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23 décembre 2009 3 23 /12 /décembre /2009 15:54


Louis Quéméner

Le Conquet 1643 – Surat (Inde) 1704

Reprise d’un article que j’ai écrit en 1989 pour le bulletin communal de l’époque, à partir d’une quinzaine de feuillets provenant de chez mademoiselle Elisa Causeur, ma tante.
Ce texte a peut-être été écrit à partir de notes de monsieur Miorcec de Kerdanet, recueillies par l’abbé Kerbiriou.  Tout ou partie a pu être publié dans le bulletin diocésain du Finistère en 1934 ou 35. Le document d’origine semble être une « Vie Manuscrite » conservée dans les archives des Missions Etrangères de Paris.
Nouvelle rédaction :
Naissance au Conquet de Louis Quéméner
Michel Quéméner était « honorable marchand » et bourgeois du Conquet  quand sa femme, le 3 septembre 1643, a donné naissance à un fils que l’on prénomma Louis.
Dom Michel Le Nobletz (1577-1652), qui connaissait bien l’enfant espiègle qu’était Louis (le gamin avait 9 ans à la mort de l’évangélisateur), aurait prédit qu’il deviendrait plus tard un personnage saint dans l’église de Dieu.
Vers l’âge de quinze ans, il se rendit avec sa mère à Sainte-Anne d’Auray, en pèlerinage sur les lieux où en 1625, un paysan nommé Nicolazic avait découvert une statue de la mère de la vierge Marie.  Après ce jour, le jeune Louis, refusa d’envisager la succession de son père dans le commerce, pour se tourner vers la religion.
Prêtre du diocèse de Léon
 On ne sait pas où il fit ses études de théologie, peut-être à Ploudaniel, là où Michel Le Nobletz fit les siennes.  On le retrouve le 7 avril 1667, débutant son sacerdoce comme vicaire de la paroisse des Sept-Saints à Brest. L’église des Sept-Saints dépendait comme du prieuré de l’abbaye de Saint-Mathieu. Louis Quéméner quitte Brest fin 1670 pour remplacer le recteur de l’importante paroisse de Ploudaniel, décédé.
Le 22 mai 1675, Louis Quéméner est au Conquet pour assister aux obsèques de son père, il signe le registre des décès : Louis Quemener Recteur de Ploudaniel, signe aussi François Corbie, prêtre de la paroisse de Plougonvelin. Sur l’acte on remarque la présence de Laurent Calvez, sieur de Kersalou, marchand du Conquet "fils et gendre du défunt"!

Copie état-civil Le Conquet 1989, JPC.














Le voyage vers la Chine

En 1680, Quéméner a quitté la Bretagne, pour se consacrer à l’évangélisation de régions lointaines. Il entre dans la Société des Missions Etrangères de Paris, fondée en 1653 par Alexandre de Rhodes, missionnaire jésuite d'Extrême-Orient où il a effectué plusieurs séjours. Quéméner fait ses classes au séminaire de la rue du Bac à Paris. Puis, il quitte la ville le 6 avril 1682 pour Brest, avec deux confrères, Louis Champion de Cicé et Jean Joret,  tous trois prêts à s’embarquer sur un vaisseau à destination de la Chine, à la demande de monseigneur Pallu déjà sur place. Jusqu’au dernier moment sa famille et ses amis essaieront en vain de le détourner d’une aventure aussi périlleuse.  (La Société des Missions Etrangères de Paris n’est pas un ordre, mais une association de prêtres diocésains, qui sous l’autorité de la Congrégation de la Propagande de la Foi, se consacrent à l’évangélisation des peuples)

Quelques mois plus tard le vaisseau double le cap de Bonne-Espérance puis la navigation se continue sans problème jusqu’à Surat en Inde. De là un autre bateau les conduit au Siam, par le détroit de Malacca, ils y retrouvent d’autres missionnaires déjà en poste. Quelques temps plus tard avec de Cicé et Pin docteur en Sorbonne. Un navire anglais les prend à son bord. « Etant sortis de la barre de Siam avec un vent contraire, nos trois missionnaires doublèrent avec bien de la peine la pointe qui sépare ce royaume de celui de Cambodge. A cette hauteur ils échouèrent, vers les deux trois heures du matin, sur un rocher perdu, ignoré de toutes les cartes, à 40 lieues de la terre ferme. Le vaisseau ne s’en tira que très malaisément et comme par une espèce de miracle. (Bien plus tard, sur rade d’Amoï, on s’apercevra que deux brasses de la fausse quille et plus de six pieds du premier bordage de derrière avaient été emportés. Cependant pendant tout le reste du voyage, il ne fit pas plus d’eau que si rien n’était arrivé). Quelques temps après le premier échouage, entraîné par le vent et les courants, le vaisseau évita de justesse un banc terrible de récifs nommé les Paracels, ensemble d’îlots rocheux qui barrent la mer de Chine sur une longueur de 80 lieues.  Après avoir doublé l’île de Hai-Nan, le capitaine anglais renonça à gagner Formose pour faire cap sur Macao. Au passage les missionnaires saluèrent l’île de Sansian, ou mourut saint François-Xavier. Après une escale à l’île de Tempo-Guebrado, à une portée de mousquet de Macao, le navire entre sur rade de Amoï, à 400 lieues de Pékin. Equipages et passagers attendirent trois mois (septembre 1684) l’autorisation de l’Empereur pour débarquer, et ne purent le faire qu’après que le navire anglais eut failli couler, abordé par une jonque.



110.JPG
Missionnaire en Chine. Ici saint François Xavier. Chapiteau sculpté, église de Javier, Espagne. Photo JPC




















L’arrivée en Chine, les missions.


A la Noël 1684, nos trois missionnaires sont toujours à Amoï . Courant janvier 1685, le voyage s’achève enfin. Louis Quéméner, rejoint le poste que monseigneur Pallu lui avait assigné avant de mourir, à Chieu-Leu, province de Fo-Kien. Il commence immédiatement l’étude de la langue des Mandarins à l’école d’un dominicain espagnol.

Les années suivantes, Louis Quéméner, vicaire apostolique,  gère la procure de Canton, tout en exerçant de temps à autre, le ministère apostolique dans les provinces de Kouang-Ton, Fo-Kien et Tche-Kiang.

Les feuillets se continuent par des extraits d’une lettre de notre missionnaire aux Ursulines de Saint-Pol de Léon, les dames de Mollien. Leurs missives parties de Bretagne le 22 février 1685 ne sont arrivées en Chine que le 24 août 1686. Les sœurs lui reprochent de les avoir oubliées. Il se récrie : Non mesdames, je ne suis pas de cette fameuse province des goûts à deux paroles ! Je ne me dédis jamais, et c’est assez que vous sachiez que j’ai vu le premier jour au Conquet et, par conséquent que je suis « bas » et « très bas-breton, pour vous avouer que vous avez tort… »  Il continue en assurant ne pas les avoir perdues dans son souvenir, pas plus que mesdames de Lesneven (monastère des Ursulines) et de Landerneau, (couvent des Ursulines), madame la supérieure de Guillimadec, ou ses chères sœurs de Ploudaniel. En conclusion il les invite à prendre de ses nouvelles par le recteur de Ploudaniel, monsieur Le Pape, et surtout à faire des dons aux missions en Chine : « il faut, dit-il, mettre la main à votre gousset pour enrichir votre pauvre frère et ses confrères ». Cette lettre est envoyée de Xao-Cheu  en Chine le 1er janvier 1687.

Ce Xao-Cheu, province de Kouang-Ton est à plus de 150 lieues de la rivière de Canton. C’est un marché très fréquenté, un entrepôt d’où l’on expédie des marchandises à travers le Kouang-Si vers le nord de la Chine. Louis Quéméner s’efforce de christianiser les Chinois du lieu, tout en bâtissant son église.


Le retour en France


En juin 1689, la santé de Quéméner s’altère, souffrant d’une « corrosion d’intestins »  il inquiète ses confrères. Le 16 janvier 1690, ayant réglé ses affaires, il est à Canton en instance de départ, pour se refaire une santé.  Mais s’il se rend à Rome c’est comme délégué des vicaires apostoliques en Chine. Le bruit courait que le pape Alexandre VIII avait pour intention de confier aux Portugais le protectorat des missions en Chine. De plus les pères des Missions Etrangères sont alors en guerre ouverte avec les Jésuites.

Le voyage à Rome s’impose donc! Un navire anglais le conduit à Pondichéry, sud de l’Inde, où il arrive à la fin de l’année. De là il gagne Surat (Inde), puis la Perse par mer. Il traverse la Perse, sans doute à pied, pour gagner Alexandrette au sud de la Turquie, où il trouve un navire qui le prend comme passager. Il débarque à Marseille fin 1691, pour y subir l’opération d’une fistule.


En service commandé à Rome


Le 20 mai 1692, guéri, c’est le départ pour Rome, mais la tempête oblige son bateau à relâcher à Gènes. Ce n’est finalement que le 10 juin 1692 qu’il débarquera à Rome.  Son voyage aller vers la Chine avait duré trois  ans, le retour en aura pris deux.

Voici donc Louis Quéméner à Rome, en qualité de procureur des Missions Etrangères mais chargé en même temps par l’évêque de Chartres d’obtenir du pape l’approbation de la constitution de la maison de Saint-Cyr, établissement fondé par Louis XIV à la porte de Versailles, sous l’impulsion de madame de Maintenon, pour l’éducation de 250 jeunes filles de la noblesse, peu favorisées par la fortune.

Le 26 novembre 1692, Quéméner a une première entrevue, secrète et particulière,  avec le pape Innocent XII au sujet des affaires de Chine, particulièrement sur la question des missionnaires portugais, et les différents entre Franciscains, Jésuites et pères des Missions Etrangères. (Longs développements complexes). L’entrevue avec le pape se déroule en Espagnol langue que pratique le souverain pontife et aussi Quéméner, dont le séjour  au  Vatican va se prolonger jusqu’en 1697. (Je passe sur les détails de cette épisode romain de la vie de Quéméner. L'essentiel de la querelle entre missionnaires venait du fait que les Jésuites pratiquaient une évangélisation "douce" en permettant aux nouveaux convertis chinois de conserver certaines pratiques ou coutumes ancestrales, tandis que d'autres missionnaires, tels Quéméner imposaient à leurs ouailles, un christianisme intolérant.)


L’évêque de Surat (Inde)


Nommé par la suite évêque de Surat en Inde, Louis Quéméner y accomplira son ministère jusqu’à son décès en 1704. Je n’ai pas de détails sur cette période.

Dès que possible, j'introduirai dans le texte une carte simplifiée des périples A/R de notre missionnaire.


LE PERE DE FONTENAY : Louis le Guennec (le Finistère Monumental tome 2)
attribue dans le blason (fantaisiste) du Conquet (dessiné par Le Men en 1898) "le 3 à la fasce d'azur accompagnée de  deux dauphins de même, à la famille de Fontenay, originaire de Lochrist quBLASON-DU-CONQUET.gifi a produit un mathématicien et astronome célèbre, le père de Fontenay, de l'ordre des Jésuites, l'un des chefs de la mission que Louis XIV envoya à l'empereur de Chine Kang-Hi pour fonder l'observatoire de Pékin. 

A bord de l'Amphitrite qui quitte Port Louis en 1702 pour la Chine, il y a en effet un père de Fontenay, jésuite.
Des documents mentionnent un père jésuite, Pierre Claude de Fontenay, né à Paris en 1663.
Les de Fontenay seraient liés à Kerambosquer en Plougonvelin.
Enquête à faire, si elle ne l'a pas déjà été.
                                                                                          JPC  décembre 2009



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20 décembre 2009 7 20 /12 /décembre /2009 11:08

LE CONQUET ET LA GUERRE DE 1870

  

Origines de la guerre : une prétention prussienne au trône d’Espagne200px-Franz_Xaver_Winterhalter_Napoleon_III-1-.jpg vacant, un courrier de renonciation signé par le roi de Prusse : « la Dépêche d’Ems », trafiquée par le chancelier Otto von Bismarck, un coup de colère du ministre français des Affaires Etrangères, Agenor duc de Gramont, prince de Bidache. Et voilà!  La France, prétendument insultée,  déclare la guerre à la Prusse le 19 juillet 1870. Napoléon III indécis et malade laisse faire.

 

L’armée française est d’abord battue en Alsace, puis le 2 septembre, encerclé dans Sedan Napoléon III fait hisser le drapeau blanc de la capitulation. Fait prisonnier, il est amené en captivité à Cassel.

   
Napoléon III empereur, par Franz Winterhalter                                                                 






Le 4 septembre, Gambetta à Paris annonce la déchéance de l’Empire et le retour à la République
. Les Prussiens progressent dans une France qui n’a quasiment plus d’armée régulière. La guerre continue.

 

A l’arrière il faut organiser la défense. Des courriers échangés entre le préfet du Finistère et  le maire du Conquet,  nous éclairent sur la mobilisation locale. Le Conquet à la fin du Second-Empire, 1 364 habitants, maire François Podeur,

Le 10 septembre,  le préfet, Ernest Camescasse  écrit : « la défense nationale est une oeuvre à laquelle tous les citoyens doivent aujourd’hui concourir. Prenez dans la garde nationale sédentaire, les chasseurs ou les braconniers, tous hommes habitués au fusil, faites en une ou des compagnies d’élite. Préparez-vous à faire couper les routes et chemins de quelque importance, et cela aux bons endroits. Les cantonniers seraient des chefs utiles pour des escouades de paysans gardes nationaux, qui ne pouvant avoir de fusils, seraient armés de pelles et de pioches.

 

Le 13 septembre, la « Patrie est en danger » nos armées ne suffisent plus a tenir tête aux envahisseurs. Dans le Finistère, on en est toujours à organiser la garde nationale. Il faut que les hommes aient un uniforme le plus simple possible, une blouse bleue avec un brassard et la cocarde nationale au chapeau. Quant aux armes, faute de mieux, chacun pourra se servir de son fusil de chasse ou se procurer des armes blanches. Trouvez dans la garde nationale ou en dehors d’elle des volontaires sachant bien manier un fusil, valides, énergiques et honnêtes. On en fera des compagnies de 50 hommes qui marcheront au commandement, là où il faudra. Les volontaires seront habillés et armés de fusils de précision qui leur seront délivrés le moment venu.

 

Au 16 septembre l’effectif de la garde nationale du Conquet recense 178 hommes, dont 17 officiers et sous-officiers.

Capitaine Faustin Rigollet, 56 ans, ancien sergent-major au 60e RI, commerçant

Second-capitaine,  Frédéric Tissier, manufacturier

Lieutenants, Jacques Porcheur , retraité, Jean Daban, commis

Sous-lieutenants, Dominique le Bourc’h, négociant, Prosper Le Guerrannic, trésorier des Invalides

Sergent-major, Jean Rampal, receveur buraliste

Sergent-fourrier,  Laurent Crenn, instituteur

Sergents,  Gabriel Lescop, domestique, Henri Le Coat, commerçant, Martin Hir, retraité, Gabriel Lescop, domestique, Hervé Poullaouec, commerçant, Auguste Migot, ébéniste, Gabriel Page, retraité, Yves Piriou, maçon, Louis Perfezou, rentier.

 

Ce jour-là la commune a reçu en dotation 40 fusils qui doivent servir à l’instruction des membres de la garde nationale.

 

Vers la fin du mois de septembre, François Tissier, directeur de l’usine d’iode, remplace Podeur comme maire, sans qu’il y ait eu d’élections municipales.

 

Le souci du gouvernement de la République est de trier dans la garde nationale ceux qui pourraient faire de « vrais soldats combattants ». Le 18 septembre, le préfet s’adresse à nouveau au maire : « le gouvernement vous confie une nouvelle mission. Le ministère de l’Intérieur a ordonné la création dans le sein de la garde nationale, de compagnies détachées qui pourront être appelées à faire un service hors de la commune.  En dehors des volontaires de tous âges vous prendrez en commençant par les plus jeunes French_Garde_Nationale_soldier_with_Tabatiere_rifle_1870-1-.jpg

1-les célibataires

2-les veufs sans enfants

3-les mariés sans enfants

4-les mariés et les veufs avec enfants.

Vous arrêterez provisoirement votre recherche à la limite de 40 ans d’âge. Dans l’intérêt de la patrie, il faut être prêt à tout, et je compte sur votre patriotisme pour assurer de ceci l’exécution rapide. S’ils devaient s’éloigner de la commune, plus de 24 heures, ils seraient assimilés à la troupe de ligne pour la solde et pour l’indemnité de route.

Cette organisation est différente de celle des tirailleurs, purement volontaires.


Uniforme de mobile de la garde nationale française, 1870
Source internet, site anglais. 






Le 24 septembre : le conseil général du Finistère vient de voter un emprunt de 600.000 francs pour l’achat d’armes destinées à la défense du pays. Cet emprunt sera réalisé par voie de souscription et émis en obligations de 100 francs au porteur, ou nominatives, au choix des souscripteurs.

 

Les Prussiens se font plus menaçants. Les provinces de l’Ouest qui n’attendaient pas la guerre sont toujours aussi peu prêtes.

 

Tours, le 1er octobre 1870, dépêche télégraphique, le ministre de l’Intérieur à messieurs les

préfets, circulaire,  sont mobilisés :

1/ Tous les volontaires qui n’appartiennent ni à l’armée régulière, ni à la garde mobile

2/ Tous les Français de 21 à 40 ans, non mariés ou veufs sans enfants

Le 2 octobre, Faustin Rigollet qui a rejoint « le camp de Brest », demande par dépêche télégraphique, qu’un garçon de Trébabu, mobilisé, lui amène son cheval.

 

  gambetta-1-.jpg





Le 7 octobre,
 Léon Gambetta quitte Paris  en « montgolfière ». La ville estencerclée par les Prussiens, afin organiser la résistance à l’ennemi.
Ci-contre, le ballon "Armand-Barbès", traînant deux grandes écharpes blanches, s'élève au dessus de la capitale. Le ministre se rend à Tours pour organiser la levée en masse sur la Loire.

 







Le 20 octobre, le sous-préfet de Brest, H. Caurant, réunit en une « compagnie »,  les mobilisés du Conquet, de Ploumoguer, de Plougonvelin, de Trébabu et de l’île Molène, soit environ une centaine d’hommes.  Le maire de Molène annonce aussitôt que les hommes valides de l’île sont tous marins, déjà requis au service de l’Etat,  il n’y a qu’un seul cultivateur susceptible de mobilisation mais il est infirme et petit de taille.

A Trébabu il y a 24 mobilisables, mais au final seulement 18 mobilisés. Guy de Kersauson retenu au premier comptage est exempté la semaine suivante pour myopie, et les autres, l’un parce que « tuteur », le reste « épileptique, idiot, ankilose bras gauche, taie sur l’œil droit, faible constitution »

A Plougonvelin, il y a 30 mobilisables, 32 à Ploumoguer.  Dans les mobilisables du Conquet on en réforme 8 : pour « hernie à gauche », « opacité cornée droite », « atrophie main droite », « rachitisme », « gibbosité (bosse), « idiotisme » « staphylome postérieur double »


La  compagnie des communes :
 Finalement la compagnie est créée, le préfet (21 octobre) rappelle que les gardes nationaux mobilisés doivent pourvoir à leurs frais d’habillement et d’équipement. La préfecture fait confectionner des effets d’uniformes pour les céder soit aux communes, soit aux citoyens au prix de revient. Pour ceux des mobilisés qui ne peuvent pas payer, on verra plus tard.

 

La compagnie comporte  24 officiers et sous-officiers,
Capitaine Jean Daban, 26 ans, du Conquet,
Lieutenant Prosper Le Guerrannic du Conquet,
Sous-lieutenants René Cloâtre de Ploumoguer, Louis Marie Jézéquel de Plougonvelin,
Sergent-major, Louis Marie Pochard du Conquet,
Fourrier, Guillaume Cloâtre de Ploumoguer. 
6 sergents, 2 du Conquet, 1 ploumoguer, 2 de Plougonvelin, 1 de Trébabu. 12 caporaux, 5 de Ploumoguer, 4 du Conquet, 2 de Plougonvelin, 1 de Trébabu.

Et sans doute, 100-125 soldats.
 

Le préfet à Quimper, comme le sous-préfet à Brest communiquaient avec le maire du Conquet, par dépêche postale par courrier à cheval pour le moins urgent, et par dépêche télégraphique en urgence. Une dépêche télégraphique mettait environ une heure et demi pour le trajet Quimper-Le Conquet et un peu moins d’une heure pour Brest-Le Conquet. (Par le réseau électro-sémaphorique).

 

 

L’armée de Bretagne. Le comte Emile de Keratry, est nommé général en chef de l’Armée de Bretagne.  Le 25 octobre, les compagnies mobilisées de l’arrondissement de Brest défilent devant lui sur le Cours d’Ajot.  Le Conquet reçoit 22 fusils de munitions avec baïonnettes, mais les préparatifs traînent. Le 31 octobre, le sous-préfet expédie au Conquet des ballots de flanelle pour confectionner des ceintures et des effets d’habillement pour la compagnie de mobiles.
On sait que Gambetta se méfiait des Bretons dans lesquels il ne voyait que des chouans, prêts à se retourner contre la république pour rétablir la royauté. D’où ces lenteurs.

 

29 et 31 octobre, le moment du départ va venir. Ayez soin, dit le sous-préfet, que chaque homme ait, un gilet de tricot ou autre vêtement de dessous chaud, un pantalon de drap, deux paires de souliers dont l’une lui sera remboursée, chaque soldat se présentera selon l’ordre du général « les cheveux coupés », (sans doute pour ne pas ressembler à des chouans). Les joueurs de musette ou biniou doivent apporter leurs instruments, ils jouiront d’un supplément de solde. Les officiers ont à se pourvoir d’urgence des objets de campement nécessaires : tente, cantine… En même temps les maires sont invités à lancer une souscription pour procurer un drapeau à la légion de l’arrondissement de Brest.

Les tambours et clairons appartenant aux communes seront emportés par les compagnies mobilisées.

 

Finalement le départ des mobilisés de Brest, s’est effectué le 7 novembre dans l’après-midi. Des effets militaires ont dû arriver au Conquet après leur départ, car le 14 novembre,  on fait retour à la sous-préfecture de 90 vareuses, 4 képis, 14 paletots, 4 ceinturons, 5 pantalons, 4 plaques, 4 fourreaux de baïonnettes, 13 gibernes.

 

Le 8 novembre, la mobilisation est étendue à tous les hommes de 21 à 40 ans, mariés ou veufs avec enfants.
 gn-mobiles.jpg

 

Le 25 novembre, le sous-préfet réclame Vincent Blevens, réputé réfractaire de la garde nationale mobilisée. Quelques jours plus tard, il est arrêté au Conquet et remis à la municipalité de Saint-Renan par  Auguste Migot, ébéniste, sergent de la garde sédentaire, pour être conduit à Brest.

 

La mobilisation ayant entraîné des dépenses pour la commune, la municipalité est autorisée à s’imposer extraordinairement par addition au principal des contributions directes, 20 centimes pendant cinq ans à partir de 1871 pour faire face au contingent imposé dans les dépenses militaires. (29 novembre)

                                                                                             Gardes Mobiles Bretons 1870                                                                                          Grande de histoire de la Commune (G. Soria)

                                                                      

L’armée de Bretagne est regroupée à Conlie près du Mans
, où elle stagnera, sans équipements, sans armes, dans la boue et la neige, ravagée par les maladies, fièvre typhoïde, variole, affaiblie par le froid et la faim, jusqu’au 19 décembre, date où, les soldats les mobiles-des-departements.jpgplus faibles quitteront « kerfank » et seront repliés sur Rennes. Le reste sera taillé en pièces par les Prussiens à la bataille du Mans, 10-11 janvier 1871. Le général Chanzy fera porter aux Bretons, armés de vieux fusils rouillés et de cartouches périmées, la responsabilité de la défaite. 

 

                Mobilisés des départements. (Source internet)











La « guerre de 70 » s’achève avec la capitulation de Paris le 28 janvier 1871
.

14 000 marins avaient été affectés à la défense de la ville. L’état-civil du Conquet nous informe du décès de Yves Le Ber,  matelot de 3e classe des Equipages de la flotte,  mort le 24 janvier 1871, d’Etienne Mazé, 2e régiment de marins, mort le 24 mai 1871, tous les deux à l’hôpital militaire du Sénat au Val de Grâce
Je n’ai pas trouvé d’autres mentions du genre.

 

                                                                   Jean Pierre Clochon, décembre 2009.

 

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4 décembre 2009 5 04 /12 /décembre /2009 11:16

MARASME ECONOMIQUE ET PAUVRETE AU CONQUET AU XIXe SIECLE

DEUXIEME PARTIE

 

Pauvres – indigents – mendiants

 

Définitions de dictionnaire (internet)

 

La pauvreté est l'insuffisance de ressources matérielles, comme la nourriture, l’accès à l’eau potable, les vêtements, le logement, et des conditions de vie en général, le non accès à l’éducation, à l’exercice d’une activité valorisante, l’absence de respect reçu des autres citoyens.

 

Indigent : c’est celui qui est privé de ressources suffisantes, qui manque des choses les plus nécessaires:

 

Mendiant : il peut s’agir d’une situation temporaire ou d’un quasi-métier avec son savoir-faire, ses usages, sa réglementation. Les enfants peuvent mendier, seuls ou en compagnie d’adultes. Le mendiant est habituellement sans domicile fixe et se déplace dans la campagne ou dans une ville

 

Dans les documents municipaux que j’ai utilisés pour cet exposé, les termes sont employés les uns pour les autres, et désignent des individus dans le besoin qui vivent du pain de la charité.

 

 

De la misère au Conquet tout au long du siècle.

 

On sait par une note municipale qu’en 1806, la ville fourmille de pauvres, qu’il faudrait pouvoir placer à Brest,  pourquoi ?  tout simplement parce qu’ils ne sont pas Conquétois d’origine. Ces individus sont venus s’établir au Conquet pendant les guerres de la Révolution et de l’Empire, dans l’espoir de trouver du travail en remplaçant les Conquétois absents.

 

On aurait pu penser que la paix revenue, chacun regagne sa commune mais ce n’a pas été semble-t-il le cas.

 

Des études plus globales sur la pauvreté dans le Finistère évaluent pour les communes rurales, environ ¼ de gens aisés ou riches, ½ d’individus qui suffisent à leurs besoins, ¼ de personnes qui doivent être assistées 

 

Qui sont les pauvres ? :

 

L’Etat-civil ne nous donne que des renseignements fragmentaires. Dès qu’un individu cesse une activité qui lui permettait de vivre et de nourrir sa famille, quelle que soit cette activité, il est réduit à la misère. L’âge est aussi un facteur de déchéance sociale. Les veuves, représentent un fort pourcentage d’indigentes, et avec elles leurs enfants. 

 

 Deux cas : la famille Soliman, le père est instituteur, il meurt en 1832, la femme a un emploi à la mairie qui lui permet de survivre avec ses enfants (admis en souvenir du père élèves gratuits à l’école), elle devient factrice, puis en 1844, à la suite de la création d’un nouveau bureau, elle n’est pas retenue comme distributrice à la poste. La voilà au chômage, indigente.

C’est le cas aussi de Gabriel Mazé, une vie active de maître charpentier de marine au Croaé, quand il ne peut plus travailler, on le retrouve mendiant à 67 ans.

 

 

Exemples dans l’Etat-Civil

 

1828, décès de Anne Falhon, indigente née au Conquet, veuve, 76 ans, déclaration par son fils charretier à Brest et par un voisin couvreur

1829, 11 février décès de Annette Le Moing, 67 ans, veuve, mendiante.

1830, 14 mars, décès de François Cornen, mendiant, 72 ans, né à Lanildut, déclaration par son fils.

1857,  30 août, Françoise Kermaïdic, veuve, mendiante, 73 ans, née à Kerangoff, domiciliée au Conquet

1857, 18 décembre, Jean Kervran, mendiant 72 ans, né à Ploumoguer, domicilié au Conquet

1860, 11 février, Paul Marie Cornen, mendiant, 75 ans, né à Molène, domicilié au Conquet

1870, Gabrielle Mazé, indigente, 59 ans, née à Prat Melou.

 

Une rue dédiée aux indigents :

 

 Recensement de 1856, Rue Dom Michel Le Nobletz, Balcon Yves, pêcheur,  57 ans, sa femme Humbert Françoise est mendiante, ses deux filles 16 et 9 ans, mendiantes, le fils 7 ans, mendiant.

 

Podeur François, marin, 52 ans, vit avec sa femme et sa belle-mère qui est indigente, dans la même maison qu’un nommé Bergot, 65 ans, marin, y logent aussi Marie Vincente Le Duff, mendiante, 52 ans, sa fille naturelle, 19 ans, mendiante, + d’autres, toute la rue….

 

Mazé Gabriel, ancien charpentier de marine du Croaé, 67 ans, mendiant y vit avec sa femme Marie Perrine Cariou, et son dernier fils, Théodore, 11 ans.



 La rue Dom Michel Le Nobletz, avec la chapelle ND de Bon-Secours.

 













 

A deux reprises dans le siècle, les disettes (famines) se font plus cruellement ressentir

 

Une première période catastrophique autour de 1816-17

 

L’enquête préfectorale du 8 juin 1816  demande aux municipalités de dresser un état des pauvres de leur commune, en constatant leur situation, leurs infirmités, leurs ressources, leur âge, ainsi que le nombre de leurs enfants. Ceci pour isoler les individus vraiment dans la nécessité de mendier, à qui le maire pourrait délivrer des permis de quêter. Les autres devant chercher du travail.

 

Le résultat : en mars 1817, pour une population évaluée à 1 100 ou 1 200 individus, on dénombre 160 pauvres dont 74 étrangers,   en juin : leur nombre a augmenté : 180 ou 200 pauvres, plus un certain nombre de pauvres honteux.

 

Le conseil municipal est d'avis que les pauvres qui ne sont pas originaires du Conquet, soient renvoyés dans leurs communes d'origine par la gendarmerie

 

La croissance de la misère est attribuée à de mauvaises récoltes qui génèrent l’augmentation du prix des céréales.

 

Une explication aux mauvaises récoltes de ces années-là

 

La décennie 1810-19 a été selon des scientifiques  la  plus froide des 500 dernières années,  On a assisté à des dérèglements climatiques qui ont eu des effets sur les récoltes et ont provoqué des disettes dans de nombreuses régions du monde.

Des études récentes accusent deux éruptions volcaniques, l’une en 1809, volcan non identifié, et l’autre les 10 et 11 avril 1815, celle du volcan Tambora en Indonésie.

 

Les effets de l’éruption du Tambora sur le climat terrestres (source Internet)
 En l’espace quelques mois les poussières et aérosols, projetés dans la stratosphère se répandirent dans l’atmosphère terrestre ce qui provoqua des modifications climatiques pendant plusieurs années à l’échelle planétaire.  A ces altitudes en effet, le dioxyde de soufre se transforme en gouttelettes d'acide sulfurique, gouttelettes qui agissent alors comme un véritable parasol réduisant l'énergie solaire reçue au sol.

Ainsi, avec l'éruption du Tambora il y eut un an plus tard, en 1816, une année sans été. En effet, cet été fut froid et pluvieux aux Etats-Unis et en Europe, avec pour conséquences des récoltes désastreuses à l’origine de famines. En France, le mois de juillet présenta un déficit de température moyenne mensuelle de 3 °C et à Paris, la pluviosité y atteint 2 à 3 fois la norme mensuelle calculée sur de longues périodes.


La misère n’est pas l’apanage du Conquet :

1830, Armand Duchâtellier évalue pour l’année 1830 le nombre des mendiants dans le Finistère à 32 000, pour 500 000 habitants.

 

Une autre période désastreuse 1845-47

 

1845, hiver froid, été pluvieux, mauvaises récoltes de céréales, doublées de la maladie de la pomme de terre (des milliers de morts en Irlande), 1846, printemps et été secs et très chauds,  manque d’eau … 1845-46-47, sont considérées comme des années de disette. De plus en 1847, une grosse crise économique sévit en France. Elle fut l’un des déclencheurs de la Révolution de 1848.

 

Dans le journal l’Océan du 16 janvier 1847, journal des Intérêts maritimes et constitutionnels :

Saint-Pol - Roscoff la misère est à son comble, il y a des troubles dus à la cherté des grains

Saint-Renan, l’hectolitre de blé est à 35 francs

Pont-Labbé, troubles engendrés par la population qui s’oppose à l’exportation de pommes de terres.

 

Un bilan en 1847, le 18 février : il existe dans la commune pour 1 249 habitants :

-Pauvres valides sans travail, 50

-Mendiants et invalides, 125 (hommes femmes et enfants en bas-âge et incapables de travailler)

-Pauvres honteux 36.

 

Ces pauvres sont dans une misère telle, que la charité publique est forcée de leur venir en aide, mais dans ces moments les secours sont pour ainsi dire insignifiants.

 

Dans le même temps le maire poursuit des pistes pour trouver des grains aux meilleurs prix.

Il écrit le 15 mars 1847 à des négociants du Havre, les Mazurier le Jeune et fils.

Les malheureux du Conquet sont plongés par la cherté des grains dans la misère la plus profonde. Ayant su que votre place est surchargée de grains et farines*, je viens, au nom de l’humanité vous prier de bien vouloir me faire connaître par retour du courrier, à quel prix pourriez-vous me procurer le quintal de froment en grains et en farine, afin que je puisse vous autoriser, si toutefois il vous convenait de me rendre ce service signalé, à faire venir quelques quintaux de chaque espèce. J’attendrai votre réponse avec la plus vive impatience. En attendant agréez, messieurs, mes civilités très empressées. Le Guerrannic fils.

 

*Pour la première fois semble-t-il on assiste à l’importation de céréales étrangères et particulièrement de blé russe. Sans doute des cargaisons ont-elles été débarquées et stockées au Havre.

 

1851, population 1 370 habitants, dont 22 militaires et marins et 43 mendiants.

 

L’assistance aux pauvres

 

Aide alimentaire

 

-Par leurs concitoyens : (1817), le tiers des ménages de la commune est hors d’état de faire aucune aumône, vu la cherté des grains. Il faudrait prélever sur les habitants les plus riches un secours de 300 francs par semaine pour fournir à peine une livre de pain par jour à chaque pauvre.

Le maire et le conseil ont décidé à leur grand regret qu’ils ne peuvent prendre aucun moyen coercitif pour faire fournir aux pauvres du pain

 

-Par la municipalité :

 

Distribution de pain

 

-Le 14 juillet 1816, fête dans diverses villes de France pour célébrer l’anniversaire  de l’heureuse arrivée de sa majesté Louis XVIII sur le sol de la patrie … réunion à huit heures le matin des fonctionnaires publics et habitants notables, puis tout le monde se rend à la grand-messe à l’église de Lochrist. Le maire de retour à la mairie a fait des distributions de pain aux pauvres nécessiteux de la commune.

 

-Premier mai 1821, à l’occasion des fêtes célébrées pour la naissance du duc de Bordeaux, (petit-fils du futur Charles X),  la municipalité a fait distribuer pour cent francs de pain aux pauvres.

 

Et ainsi à chaque célébration « nationale ».

 

Une fausse joie, les oranges.

Dans la nuit du 17 au 18 décembre 1821, un navire chargé d’oranges a péri sur la pointe de Penzer. Des caisses de fruits sont arrivées à la côte, mais interdiction d’y toucher, la fièvre jaune sévissant en Espagne. Sous les yeux de la population, tout ce qui de l’épave est venu à la côte a été brûlé. La douane accompagnée du sergent de police Jean Ely a perquisitionné chez les particuliers, a confisqué et a détruit une assez grande quantité d’oranges.

(Voir dans ce blog, l’évocation de ce fait-divers, dans la rubrique « choléra »)

 

 Fourniture d’emploi

 

Carrières, la municipalité qui manque toujours autant de ressources pour venir en aide aux nombreux malheureux du Conquet pense alors, vers 1840,  à ouvrir de nouvelles carrières de pierres plates (schistes), dans les terrains incultes de Pors-Feunteun (Le Bilou) et de Portez qui lui appartiennent.

 

Double but : faire entrer de l’argent pour subvenir aux besoins des pauvres en vendant les pierres aux communes environnantes et fournir du travail aux carriers qui seront payés pour les pierres de 25 cm à 1,25 m, un centime par pièce ou un franc par cent et pour celles de 1,25 m et au-dessus, deux centimes par pièce. On accusera plus tard les carriers d’avoir complètement détruit le relief rocheux naturel prolongeant en mer la pointe Sainte-Barbe  et offrant au Conquet un rempart contre la houle de sud-ouest.

 

Entretien des chemins vicinaux, utilisation des chômeurs indigents à l’extraction et au transport des pierres, pour la réfection des chemins vicinaux. Mais la commune qui par exemple a voté en janvier 1847 une somme de 150 francs pour financer cette opération voit vite l’argent épuisé et se trouve dans l’impossibilité de faire un plus grand sacrifice.

 

Aide exceptionnelle

 

Loterie de 1847,  la commune compte alors 1 249 habitants dont 212 sont plongés dans la  plus grande détresse.

 

Organisation d’une loterie : « je propose dit le maire, 800 billets à 50 centimes pièce, les bénéfices seront utilisés à l’achat de pain pour les malheureux ».

 

Le maire sollicite le comte de Las Cases député du Finistère à Paris, pour demander à la famille royale « quelques lots pour soulager notre profonde misère, nous les recevrons, dit-il, avec la plus vive reconnaissance et nous bénissons le ciel d’avoir élevé une dynastie dont la sollicitude constante est de veiller au bonheur de tous les Français. 

La reine Louise Marie Amélie de Bourbon, princesse des Deux-Siciles,  expédie une caisse qui, reçue le 16 mars 1847, renferme un sachet de satin blanc, brodé soie et or, et une cassette en velours brun surmontée d’un médaillon de soie de couleur.

 Les autres lots sont une génisse d’un an, une montre d’argent, une quantité assez considérable de pain* et tous les objets mobiliers que les habitants de la commune se feront le plaisir d’offrir.

 

*Au vu de la date, il est probable que Le Guerrannic a pu obtenir grains ou farines des Mazurier du Havre, voir plus haut.

 

Autour de 1855, pour la fête du 15 août, la suppression des surtaxes d’octroi a empêché la caisse communale de voter des secours aux pauvres. Pour marquer la sainte Marie,  seront employés pour les indigents les 50 francs versés par l’empereur. Pour le remercier les habitants sont invités à pavoiser et à illuminer. Le maire regrette de ne pouvoir venir en aide aux familles des victimes de la guerre de Crimée.

 

 

L’aide aux pauvres est toujours parcimonieuse, faute d’argent dit-on, mais  par contre il n’y a aucun problème majeur, pour trouver l’argent nécessaire à la construction d’une église neuve :

 

Pour mémoire : devis pour la construction de l’église :

 Le coût des travaux s'est élevé à     62380 Francs,  ainsi financés:
 Souscription populaire   31 932 F
Fonds de la fabrique        4 000 F

 Secours départemental    3 000 F

Emprunt                         15 000 F

Complément de l'Etat       8 448 F

 

 

Scolarisation des enfants « indigents », élèves « gratuits » 

 

Le décret du 3 brumaire an IV stipule qu’il y ait  une école au moins par canton.

-Chaque école sera divisée en deux sections, une pour les filles, l’autre pour les garçons.

-Les  instituteurs seront examinés par un jury d’instruction primaire, sur présentation des administrations municipales, par les administrations départementales.

-Ils auront droit à un logement

-Leur traitement sera réduit à une rétribution payée par les élèves (taux fixé par département)

-Un quart des élèves pourra être exempté de rétribution, par l’administration municipale, à titre d’indigents.

 

L’école au Conquet est installée le 21 germinal an XII, elle accueille aussi les enfants de Plougonvelin et de Trébabu.

 

Loi Guizot : 28 juin 1833 pour la première fois, toutes les communes françaises sont tenues de pourvoir à l’entretien des maîtres et des écoles.

Les maîtres ajouteront au traitement assez modique versé par la commune, la rétribution scolaire payée par ceux des parents d’élèves qui ne sont pas indigents, soit 1f pour la plus petite classe, 1,50 f pour la seconde, 2f pour la troisième section.

 

C’est le maire et son conseil municipal qui dressent la liste des enfants admissibles gratuitement à l’école primaire, par suite de l’impossibilité où se trouvent leurs parents de payer la rétribution mensuelle.

23 août 1835, liste des enfants indigents admis, (entre 6 et 15 ans), 41 garçons et 44 filles

Traitement fixe pour l’instituteur 200 f par an

Indemnité de logement car la maison d’école n’est pas habitable 200 f

 

1844, les admis indigents sont : 29 garçons (21 familles), 12 filles (12 familles))

 

Classe de l’instituteur 24 garçons payants

Salle d’asile (maternelle) 20 garçons et 15 filles, 10 payants,

Classe de l’institutrice : 6 garçons, 34 filles, 26 payants.

 

1861-64, le plancher de la classe communale des garçons est à 50 cm au dessous de la rue, d’où une humidité permanente, la lumière est faible, les enfants n’y voient rien l’hiver, cependant 64 enfants viennent se grouper chaque jour dans ce réduit obscur.




 Bâtiment donné à la municipalité par Fréderic Tissier et sa mère en 1877, à usage de mairie et d'école.













Il faudra attendre Jules Ferry instituant
 l’école publique, laïque, gratuite et obligatoire, pour voir disparaître la catégorie "élèves indigents", en 1881-82.

 

Je raconterai prochainement dans ce blog, l’histoire de l’école publique au Conquet.

 

 

Pauvreté temporaire, cas des pêcheurs.

 

Les pêcheurs conquétois sont des saisonniers, (voir sur ce blog « les Paimpolais » si de Pâques à septembre, les crustacés, langoustes et homards ont été abondants et les prix satisfaisants, l’hiver sera facile à supporter. Dans le cas contraire beaucoup de marins et leurs familles seront en grandes difficultés.

On peut ajouter à cela la réputation des femmes « paimpolaises », cigales plus que fourmis, qui dépensaient sans compter l’argent des jours fastes, et l’hiver venu se trouvaient réduites à solliciter la charité publique.

 

En 1897, la liste des 28 patrons pêcheurs est annotée, sans doute par le syndic des gens de mer, trois noms sont qualifiés d’indigents.

 

 

Avec quels atouts, avec quels handicaps la commune du Conquet va-t-elle rentrer dans le XXe siècle ?

 

 

La pêche dynamisée : les « Paimpolais » cessent leurs migrations estivales à Sein en 1898, la ressource étant épuisée. Sur les traces des Camarétois, les pêcheurs Conquétois vont se lancer dans l’aventure de la pêche au large, jusqu’aux côtes d’Espagne et du Portugal, mais surtout en direction de l’Angleterre. (voir le sujet traité dans ce blog)

 

Côté aménagements portuaires, c’est le statut-quo, rien depuis la digue Saint-Christophe en 1876. En dépit de multiples projets avortés, Le Conquet est toujours un aber sans protection, qui s’ensable. Il n’y a plus aucun armateur au commerce.

 

La population augmente (1650 habitants) avec les naissances chez les « Paimpolais » et aussi avec le rattachement au Conquet des îles et îlots de Béniguet, Quéménès, Litiry, Trielen, Bannec distraits de Ploumoguer le 24 avril 1900.

 

L’usine d’iode Tissier continue à fonctionner avec une trentaine d’ouvriers et la noria des bateaux goémoniers de Landéda et Plouguerneau.

(1903 : rattachement (provisoire) de domicile administratif de 52 familles de goémoniers de la région de Plouguerneau, au Conquet, problème avec le gendarme conquétois)

 

Une activité commence à pointer, le tourisme, villas, hôtels et bientôt 1903, la ligne de tramway avec Brest, il faut dire que le maire, Hippolyte Levasseur y a donné de l’élan, il fut un temps président de la chambre de commerce de Brest.

 

Dernière note, pessimiste : l’abbé Le Chat recteur du Conquet à la fin d’un historique de la ville écrit en septembre 1936. « Aujourd’hui le port du Conquet traverse une crise plus sévère que toutes les autres et dont il ne se relèvera peut-être jamais, les deux industries côtières de l’iode et de la pêche sont gravement menacées :  Bientôt elle aura vécu la vieille cité maritime pour devenir simplement une petite station balnéaire et touristique … retrouvant un peu de mouvement, de gaité, d’animation factice pendant les jours d’été… pour devenir petite ville morte et lugubre pendant les sombres jours d’hiver ».

 

                                               JPC, décembre 2009

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4 décembre 2009 5 04 /12 /décembre /2009 11:07

Texte de la conférence du mardi 1er décembre 2009, organisée par la médiathèque de Plougonvelin à  l'Espace Keraudy. 
Jean Pierre Clochon  : "je vais vous présenter une période assez sombre de l’histoire du Conquet, qui se déroule en gros de la fin du XVIIIe siècle à la fin du XIXe siècle".


MARASME ECONOMIQUE ET PAUVRETE AU XIXe SIECLE AU CONQUET  


PREMIERE PARTIE :
 

 

Cette période se caractérise par une étonnante variété de régimes politiques successifs en France.

 

•         La fin de l’Ancien Régime, Louis XV puis Louis XVI

•         Une révolution 1789 (chute de la royauté)

•         La Première République, puis le Directoire, le Consulat

•         Le 1er Empire avec Napoléon 1er

•         Retour à la royauté après Waterloo : deux rois de France, Louis XVIII et Charles X

•         Une révolution : 1830

•         La royauté se maintient : Louis Philippe 1er,  roi des Français

•         Une révolution : 1848

•         La Seconde République

Le coup d’état de décembre 1851, fait de Louis Napoléon Bonaparte le prince-président, qui prend bientôt le titre d’Empereur.

•         Second Empire, Napoléon III chute avec la guerre de 1870, (Camp de Conlie, commune de Paris

•         La 3e République s’impose difficilement, mais dure longtemps

 

 

Ces bouleversements politiques n’ont aucune répercussion sur la vie municipale conquétoise, les maires sont des notables, pas des hommes politiques, ils sont nommés par les préfets et semblent indifférents aux changements de gouvernement en France. Ils les acceptent en apparence sans état d’âme.

 

Pour s’en convaincre : Jean Marie Le Guerrannic, le père,  conseiller municipal et maire depuis l’an VIII. (directoire, consulat,  puis périodiquement jusqu’en 1837)

 

Sous le 1er Empire, Le Guerrannic,  le 5 décembre 1813, fait chanter un Te Deum en mémoire et action de grâces de l’heureux avènement de Napoléon à l’Empire Français et quelques mois plus tard alors que l’empereur est à l’île d’Elbe, il assure  Louis XVIII  de... "la vive joie dont sont pénétrés les habitants du Conquet de l'évènement heureux qui leur a rendu leur souverain légitime et les a délivrés de la tyrannie odieuse sous le joug de laquelle ils gémissaient depuis trop longtemps."  

 

 Son fils Jean Marie Le Guerrannic (fils), conserve la mairie de 1843 à 1859 ce qui le contraint à prêter serment à quatre régimes différents, au roi Louis Philippe d’abord : « Je jure fidélité au roi des Français, obéissance à la Charte constitutionnelle et aux lois du royaume » puis le 6 mars 1848 à la République : «  Citoyens, la monarchie vient de succomber et le gouvernement républicain lui a succédé, saluons avec orgueil l’étendard de la liberté, vive la République, vive l’ordre et la liberté ! » au prince-président Louis Napoléon Bonaparte à la veille de son accession à l’Empire: « Monseigneur, nous sommes heureux de joindre nos voix aux acclamations unanimes de la France et d’adresser à votre Altesse Impériale le juste tribut de notre reconnaissance pour les bienfaits que vous doit le pays dans lequel vous avez ramené la paix et la tranquillité Consolidez votre œuvre providentielle en acceptant l’Empire auquel vous convie la volonté nationale ; nos cœurs forment le même vœu ».

 

Et il ne manque pas de féliciter Napoléon III  en faisant chanter en Juin et juillet 1859, deux Te Deum pour les victoires de Magenta et Solferino (« boucherie » ayant entraîné la création de la « Croix-Rouge » par Henri Dunant.

« Sire, pénétrés d’un profond sentiment d’admiration pour les pages glorieuses que l’Armée Française sous l’habile commandement de Votre Majesté vient d’ajouter à sa courte mais décisive campagne d’Italie. Pénétrés aussi d’une vive reconnaissance pour cette paix si opportune que Votre Majesté a offerte avec une loyauté chevaleresque qui n’appartient qu’à un grand monarque, le Conseil Municipal de la commune du Conquet, monsieur le Juge de Paix du canton de Saint-Renan et monsieur l’instituteur du Conquet prennent la liberté de déposer aux pieds de votre auguste personne l’hommage de leur inaltérable dévouement à Sa Majesté Napoléon III et à sa dynastie bien-aimée.

                                             Vive l’Empereur »

 

 

Le premier maire « politique » au Conquet sera Frédéric Tissier, républicain et franc-maçon élu en 1876.

 

UNE COLLECTION  DE HANDICAPS :

 

Si heureusement elle ne traverse pas de crise politique, la commune du Conquet est au début du XIXe siècle lourdement pénalisée par une collection de handicaps :

 

-Son isolement

-L’héritage désastreux d’un passé récent

            Vie maritime éteinte

             Séquelles de la Révolution et de l’Empire

-Une production agricole insuffisante

-Une forte proportion de pauvres, indigents et mendiants dans la population

 

 

Le Conquet petite commune isolée au bout du monde

 

a l’extrême ouest du département, Le Conquet est une toute petite commune de 480 ha environ, bordée sur la rive nord de l’aber du Conquet par la commune de Ploumoguer, à l’est-nord-est, dans la zone de Kerjan par la commune de Trébabu, et à l’est et au sud par la grande commune de Plougonvelin, plus de 1800 hectares. A l’ouest c’est la mer.


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 Cadastre de 1841





















Des chemins existent
entre Le Conquet et Plougonvelin mais les échanges commerciaux entre ces deux communes étant insignifiants, leur intérêt économique est négligeable.

 

Les liaisons avec la sous-préfecture et le chef-lieu de canton sont médiocres : pas de route directe vers Brest, elle ne sera achevée qu’aux environs de 1860, en longeant sur un remblai la rive sud de l’étang de Kerjan, après avoir cassé les têtes de roches.

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En rouge, la "Grande route du Conquet à Saint-Renan.I l n'y a pas de passage possible le long de la berge sud de l'étang de Kerjan.







Pour aller à Brest il faut prendre la direction de Saint-Renan par la route dite de grande circulation, départementale N°4. Mais par endroits, c’est à peine plus qu’une voie charretière avec, dès la sortie du Conquet un passage difficile depuis l’anse de Poul Conq jusqu’au franchissement du barrage  de Kerjan, passage fréquemment transformé en bourbier par la pluie ou les grandes marées.

Les rouliers y restent souvent envasés. Une fois passée cette épreuve du charretier embourbé, les attelages sont confrontés avec la rude côte qui mène vers Trébabu. Des chevaux y ont succombé à la suite d’efforts trop violents. En sens inverse : des accidents plus ou moins graves arrivent continuellement dans la descente de Kerjan, quand les chevaux ne peuvent plus retenir les tombereaux lourdement chargés, qui versent.

 

carte-depart-4.jpg Parcours en 1821 du messager Soliman. Il doit se rendre à la sous-préfecture les lundis et vendredis. A l'aller il amène les dépêches de Ouessant, Molène, Le Conquet, Plouzané. Au retour il ramène les courriers pour ces localités.
Trajet : Le Conquet, Kerjan, Kerzeveon, Plouzané, La Trinité, Saint-Pierre, Recouvrance, traversée de la Penfeld par le bateau du passeur et Brest.  





plan-kjan.jpgLa route de Brest a été ouverte vers 1860, en cassant les têtes de roches le long de la berge de l'étang de Kerjan et en établissant un remblai carrossable
 (Le pont tournant de Recouvrance a été inauguré par Napoléon III en 1861)







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Rappelons que pour se rendre à Ploumoguer, le passage se faisait à marée basse, par le gué entre le Croaé et le Cosquies, au niveau de la passerelle actuelle. (Détail de carte postale)






























Côté port, aucune infrastructure portuaire, hors les quais ou cales du Drellac’h construits 1835-44 et le môle Saint-Christophe édifié entre 1873 et 76


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Dessin (détail) du Conquet vers 1850, sans doute par Ernest Le Guerrannic. Les quais du Drellac'h sont terminés, la chapelle Saint-Christophe a perdu son clocher, le toit en bâtière de la tour Est de la maison des Seigneurs est tombé depuis 1847.



 

Héritage désastreux d’un passé récent

 

 -Une vie maritime éteinte

 

Pour mémoire, Le Conquet n’ayant rien jamais rien eu  à exporter, et un minimum à importer pour sa seule population, la flottille conquétoise s’était constituée  dès le XIVe siècle de transporteurs qui allaient chercher principalement le sel aux salines de l’ouest (Aunis, Saintonge), pour la Normandie : Honfleur sel de consommation pour Paris ou l’Artois - Picardie (salaisons de poissons)


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Type de barque conquétoise du XVIIIe siècle, dessin de Nicolas Ozanne.
 















Le traité de Paris  du 10 février 1763 qui a exonéré les Anglais et leurs alliés de taxes à l’exportation de marchandises depuis les ports français, a ruiné notre commerce de petit cabotage. Les navires anglais, plus gros porteurs, avec des équipages moins nombreux, aux salaires moindres, ont emporté les marchés. La flottille conquétoise qui avait atteint au milieu du XVIIIe une bonne quarantaine de navires, a fondu rapidement.

 

Les armateurs ont porté leurs spéculations vers Brest, les marins ont suivi.

 

La guerre de d’Indépendance des Etats-Unis d’Amérique, grande dévoreuse d’équipages, avec les escadres françaises  rentrant à Brest, désemparées, moins par les combats navals (bataille d’Ouessant 27 juillet 1778) avec les Anglais,  que par les ravages du typhus (Retour à Brest de la croisière sur les côtes d’Espagne de la flotte d’Orvilliers), a vu périr des milliers de matelots.

 

Tous les petits ports du Léon ont été touchés par la faveur faite aux Anglais : Enquête de 1774, paroisse de  Plouzané : le recteur déplore que la décadence du commerce et de la navigation a fait affluer à Plouzané  une foule de marins dans la nécessité de mendier venus de Porspoder et autres paroisses voisines.

 

Au Conquet la situation est catastrophique :

 

Mai 1790, Dans une adresse à l’assemblée nationale, les notables du canton du Conquet évoquent : … des maisons presque désertes, des chaumières éparses, souvent tombant en ruine, habitées par une espèce pauvre et souffrante qui, assoupie dans l’inaction …est constamment malheureuse,  Dans cet état passif de stagnation et d’apathie, elle offre le spectre effrayant de la misère…

 

Pendant le blocus des côtes par les Anglais, on ne pouvait pas s’attendre à une reprise des activités commerciales. Après les temps troublés de la Révolution et de l’Empire, le port du Conquet ne se relève pas.

 

CABOTAGE / Des armateurs qui, comme François Tissier, directeur de l’usine d’Iode et la famille Le Guerrannic, marchands de vin, arment quelques caboteurs, ne trouvent pas de capitaines ni de matelots conquétois pour en former les équipages. Ils font alors appel à des marins du quartier du Conquet, … (Quartier du Conquet, créé en 1734, fermé en 1930 : syndicat du Conquet, d’Ouessant, de Porspoder, de Labervrac’h,), ou de quartiers voisins.

Exemples, le « Frédérick » à Tissier est commandé par Martin Malgorn d’Ouessant, le « Saint-François » par Yves Stéphan aussi d’Ouessant, l’ »Amélina » à Le Guerrannic a pour capitaine Cézar Le Gall de Porspoder… Ces bateaux font du cabotage national ou international (Pays de Galles), et ne passent quasiment jamais au Conquet.

 

GOEMON-IODE/ On pourrait s’attendre qu’avec le développement de la fabrique d’iode, de nombreux Conquétois soient devenus marins-goémoniers, eh bien non ! pas un seul entre 1830 et 1955.

 

PÊCHE/  Quant à pratiquer le métier de la pêche, ce n’était pas une activité conquétoise au XVIIIe siècle, puisqu’on disait n’y pas trouver de poisson à acheter, même les jours de carême. La famille Le Guerrannic a en copropriété à Molène avec des Molénais, quelques petits bateaux de pêche.

 

Il  faudra attendre les années 1850 pour voir s’installer au Conquet une population de pêcheurs venue de Loguivy de la Mer, y introduire la pêche des crustacés aux casiers. Sans conflit avec une concurrence locale inexistante (voir sujet traité dans ce blog « Les Paimpolais »

 

Des séquelles de la Révolution et de l’Empire : tissu urbain sinistré, maisons en ruines, rues défoncées.

 

Les menaces étrangères qui pèsent sur la France révolutionnaire et sur la 1ère République (20 sep 92), d’abord la coalition Autriche-Prusse en 1791, puis l’entrée en guerre de l’Angleterre en février 1793, amènent des troupes en garnison sur nos côtes, toujours pour la protection avancée de Brest. C’était déjà le cas à l’époque de Vauban et dans d’autres situations, mais en général l’alerte passée, les soldats étaient démobilisés.

 

Cette fois c’est pendant près de 25 ans que la ville du Conquet va être occupée par des soldats, canonniers gardes-côtes, troupes de ligne, légions de Volontaires, gendarmerie, équipages des canonnières en station au port, corsaires…

 

-Organiser l’accueil des militaires est le casse-tête quotidien de la municipalité. La ville est dépourvue de caserne, hormis les quatre petits corps de garde de Sainte-Barbe, de la Pointe des Renards, de Pors-Feunteun, et de Porsliogan. Ainsi quand le 2e bataillon du 39e régiment de l’Ile de France arrive le 1er juillet 1791, il n’y a aucun bâtiment convenable pour  loger les soldats, donc le maire, dans l’urgence les place chez des particuliers, puis on désigne comme casernes la maison d’Olivier Cornec rue Poncelin, deux maisons à Le Dall-Quéréon à Gorre-Conq, (Charles Marie Le Dall de Kéréon a été guillotiné sous la Terreur à 19 ans) et on leur attribue comme corps de garde une petite maison sur la place au milieu du Conquet appartenant à madame veuve Tanguy Provost,.

 

Je pourrais multiplier les exemples de réquisitions.

 

Ceci, dit le président du canton en l’an VIII, ne serait que demi-mal si l’état avait versé régulièrement le loyer pour ses militaires, mais c’est loin d’être le cas. Des propriétaires depuis 6 ou 7 ans qu’ils logent des troupes chez eux, n’ont pas reçu un centime et donc n’ont fait aucune amélioration  ou réparation urgente à leurs maisons, ce qui fait qu’il y en a de nombreuses qui menacent ruine.

 

La présence des soldats en ville se double d’un climat d’insécurité

 

Toujours des soucis avec la troupe, le 16 vendémiaire an IX, le maire Christien Créac’h se plaint que les 161 hommes de la Légion des Volontaires et des 45 hommes d’un détachement d’infanterie pèse trop lourd sur sa commune, car ils viennent en plus de la 11e  compagnie d’artillerie pour la garde-côte qui est au Conquet depuis trois ans. « Les habitants s’en plaignent beaucoup car ils ont acquis tant de connaissance de ce pays et font tant de liaison avec les mauvais sujets de l’endroit que des vols très multiples et très conséquents se commettent…  les militaires armés quittent leurs postes la nuit et courent la campagne volant et semant la terreur. » Et, le 27 pluviôse an IX, entre huit et neuf heures du soir, Marie Michelle Quéouron, commerçante, est assassinée par des inconnus. Cette dame est la mère de François Monté, (notable, boulanger, et un temps maire du Conquet).

 

Les menaces anglaises s’intensifiant sous l’Empire   : de nouvelles troupes arrivent en renfort  Un jour le maire qui a déjà placé 445 soldats du 70e régiment, doit faire face à l’arrivée de 2 compagnies de 135 hommes chacune. Impossible répond-il à l’autorité militaire de les accepter ici, la plupart des militaires présents  n’ont pas de lit et dorment sur la paille ».

 

Déjà en avril 1793, le citoyen Thomas qui commande le 3e bataillon  des Côtes-du-Nord signale aux officiers municipaux et au maire le mauvais état d’une caserne au Conquet où sont logés ses hommes : couverture du toit crevée, quand il pleut l’eau tombe même dans les lits. Les vents y arrivent de tous côtés, et l’on ne peut faire de feu sans être aveuglé par la fumée, faute de quelques carreaux qui manquent aux fenêtres.

 

 J’ajouterai que les unités de soldats sont accompagnées de  prétendues blanchisseuses, qui troublent l’ordre public. Un conseiller municipal se plaint que les ébats de ces dames avec les soldats dans les champs, gâtent  beaucoup les blés.

 

 

1815, après Waterloo, fin des guerres. Le Conquet, ville ravagée se vide de ses militaires.

 

La ville

Les troupes ont quitté Le Conquet depuis une quinzaine d’année quand Jean-François Brousmische écrit :

 

On est frappé de tristesse en entrant au Conquet. Cette ville ne sera bientôt plus qu'une misérable bourgade…, la ville du Conquet semble une solitude. Sur trois maisons, c'est à peine si l'on en trouve une qui soit habitable ; la ronce et le lierre couvrent les débris des autres. Le Conquet est, de plus, la ville la plus mal pavée du Finistère.

(Le texte intégral de Brousmische sur Le Conquet et celui de Flaubert se trouvent sur ce blog)

 

Gustave Flaubert : Le Conquet, grand bourg paisible dont les habitants semblent partis, ne vaudrait pas la peine de s’être dérangé pour le voir s’il n’y avait non loin l’abbaye démantelée de Saint-Mathieu…

 

Et le maire,  Faustin Rigollet en 1881 : beaucoup de maisons sont inhabitées, en ruines, ou occupées par des indigents.

 

 

Les rues : Elles ont été défoncées par les lourds attelages militaires, transportant vivres et munitions. En 1813, quelques subsides permettent de repaver la Grand-Rue, On restaure un peu la rue Bernard avec des cailloux et des pierres de grève, que l’on va chercher à Beniguet, quant aux autres, la rue Etroite, la rue Kerdacon, la rue Saint-Christophe et la rue Neuve, elles sont dans un tel mauvais état que le budget de la commune ne peut rien y faire.

 

Bien plus tard dans le siècle, on ne voit pas beaucoup d’amélioration, la rue Bernard qui sert pour les rouliers qui se rendent  de Lochrist vers la grève de Ploumoguer est dans un état si déplorable que les piétons en hiver ne peuvent la fréquenter. De plus il se fait le long de cette rue des dépôts de fumier qui anticipent sur la voie publique.

 

 

Une constante tout au long du siècle

 

Manque d’hygiène, Insalubrité

 

D’un bout à l’autre du siècle, les rues et chemins sont encombrés de fumiers en dépit des règlements municipaux. Par exemple en 1838, « Défense de déposer les fumiers ou immondices sur les voies publiques, les fosses d’aisance ne pourront être vidées que la nuit et nettoyées de même et au plus tôt de 9h à 10h le soir. Les fumiers laissés dans la rue seront confisqués.

 

1848, Le puits : « chaque jour je reçois des plaintes sur l’état de l’eau de ce puits qui est la seule dont puissent profiter les habitants du Conquet.

Souvent on a retiré de cette eau des chats morts, des chiens, des rats et une foule d’immondices. Vous comprendrez, citoyen sous-commissaire que pour la santé publique, cet état de chose ne peut plus durer. Quelques temps plus tard, une pompe est installée sur le puits (Voir ce sujet traité dans ce blog, la place du Marché, le puits, la pompe)



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La place du Marché avec le puits central.
Dessin de Louis Le Guennec, d'apès Lesage.
(On note l'effet "grand-angle")











Vers la fin du siècle, la place du Marché est toujours aussi peu accueillante : en 1884, François Crenn membre du conseil municipal propose d’empêcher les eaux sales de séjourner dans la Grand-rue où les cochons  et les oies viennent journellement se vautrer, de combler le ruisseau à partir de la pompe et de le remplacer par une canalisation qui irait aboutir au Casse-Cou et à la mer. Robert Menguy qui pourtant n’habite pas loin,  rétorque que le ruisseau est peu profond et qu’il suffit de prendre ses précautions pour y passer sans incident.

A propos des cochons, il en est de non-muselés qui divaguent dans les rues, attaquent les passants et les mordent. La ville devait être parfois une vraie ménagerie, dans les années 1832-33,  on relève de nombreux arrêtés contre les divagations des  animaux. La fourrière se trouvait alors chez madame veuve Hérault (ou Ayraud), 60 centimes jour et 1 franc nuit pour les chevaux, 50 centimes jour ou nuit pour les bêtes à cornes, (vaches, moutons), et de même par pourceau.

La grève de Portez et le terrain vague avoisinant sont désignés comme décharge pour les décombres et immondices.

 

Le manque d’hygiène est aussi mis en cause à l’occasion de la propagation de maladies.

 

24 mai 1890, lettre du maire au sous-préfet de Brest. « Les fièvres typhoïdes et fièvres muqueuses peuvent être considérées comme endémiques dans notre localité. Il en existe toujours quelques cas et cette année il ne semble pas que ces cas doivent être plus nombreux que les années précédentes. Depuis plusieurs semaines on a constaté un seul malade, un enfant fréquentant l’école des garçons. Le dénouement a été fatal, mais ce triste évènement peut être attribué en bonne partie à un défaut d’hygiène et à des imprudences et, d’autre part au peu de ressources dont pouvait disposer la famille du jeune malade. Il n’y a donc pas lieu de s’alarmer ».

 

24 mai 1890  A signaler « plusieurs cas de fièvres muqueuses, pas plus nombreux que l’année dernière. Ils sont dus comme ailleurs, au défaut d’hygiène des habitants, à la misère, au manque de propreté de certaines habitations. Comme aussi au défaut d’aération de certains quartiers de la ville que la municipalité se propose d’assainir, aussitôt que l’autorité préfectorale l’aura autorisée à contracter l’emprunt de 5 000 Francs pour des travaux de voierie. »

 

 

Des ressources agricoles insuffisantes, un territoire cultivé exigu, (371 ha de terres labourables sur 488 ha). Des marchés et foires peu importants.

 

 

1810, à propos des récoltes

-1 000 habitants, 199 abs au service de mer et de terre.

-6 000 quintaux de 100 livres est la quantité nécessaire à la consommation des habitants, à 100 quintaux celle des animaux domestiques, à 346 quintaux ordinaires pour l’ensemencement de 173 journaux. Chaque quintal semé rapporte sept quintaux = 6 446 quintaux nécessaires.

 

La récolte de grains n’est jamais suffisante, les habitants se pourvoient au petit marché hebdomadaire des grains apportés par les marchands de Ploumoguer, Plougonvelin et Trébabu.

 

-1825, la commune du Conquet est la moins commerçante de tout le canton de Saint-Renan et de celui de Ploudalmézeau : par conséquent les marchés n’y sont rien. (L’octroi est peu lucratif).

 

                     Marché en 1849, 2 foires, 10 mai et 23 septembre

                            1 grand marché 1er mardi de juillet

                            Marchés ordinaires tous les mardi matin

 

On vend dans les foires : froment, orge, orge fromenté, seigle, chevaux, vaches, moutons, porcs, lard, graisse, sabots, fruits, tamis et cribles, beurre, œufs, laines, poteries de Lannilis, indiennes, mouchoirs, tabliers, petite mercerie.

 

Marchés ordinaires, froment, orge, orge fromenté, seigle, lard, beurre et œufs.

 

-Cependant les terres des environs du Conquet sont très fertiles ; la location en est aussi élevée qu'à Plouguerneau, qu'à Cléder ; on se demande, quelle est la cause de la misère apparente qui se fait remarquer ici, sans qu'on puisse résoudre cette question. (Brousmische 1830). Le goémon qui fait l’engrais du pays existe en abondance.

 

En 1851,  pour 1 370 habitants, la population agricole est de 587 hommes et femmes.

 

-Cultures pratiquées : céréales, choux, panais (sorte de carotte), pommes de terre (assez peu semble-t-il). Plus élevage.

 

L’octroi,  est une taxe perçue sur les marchandises à l’entrée dans une ville ou un bourg : comme il y en a peu, l’octroi ne rapporte pas grand-chose.

 

Recette de l’octroi, receveur Delaunay

pour 1813 : 1 880 francs

pour 1814 : 1 367 francs

pour 1817 :   457  francs

pour 1818 :   465 francs

pour 1819 :   937 francs

pour 1820 :   961 francs

pour 1821 :   941 francs

pour 1822 :   905 francs


 Copie-de-finistere-carte-19e.jpg

 Les paysans éleveurs de chevaux se débrouillent bien. Leurs bêtes remportent des prix dans les foires de la Martyre. Ainsi, en août 1821, les sieurs Jean Marie Lannuzel, Yves Floc'h, Goulven Le Bras, et Ambroise Le Ven ont remporté plusieurs médailles.

 



FIN DE LA PREMIERE PARTIE

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13 novembre 2009 5 13 /11 /novembre /2009 12:36

UNE  FAMILLE QUI A MARQUE LE CONQUET :
           MAZE-LAUNAY


 

 

-Jean Mazé, honorable marchand, décédé avant 1693. Son épouse Marguerite Morel, meurt au Conquet en 1712, âgée de 84 ans, elle est enterrée dans l’église de Lochrist. Ce couple a eu des enfants dont un fils :

 

-Laurens Mazé, qui se dit sieur de Launay, né vers 1660,  se marie au Conquet avec Anne Rioualen, d’une famille de maîtres de barques. Le couple a au moins un fils, né le 27 août 1697, aussi prénommé Laurens.

Laurens, le père, marin, disparaît au cours d’un voyage effectué en 1710.

 

 Le garçon patiente jusqu’à ses 30 ans, en 1727, quand le décès du père est reconnu par les autorités, pour être émancipé et obtenir sa part de succession. Pendant tout ce temps, célibataire, il vit chez sa mère sur, ou tout près de la place du Marché.

 

Lorsque Anne Rioualen meurt en 1741, âgée de 72 ans, l’estimation de ses biens non fonciers (s’il existe du foncier, je ne le connaît pas), atteint seulement 187 livres, autant dire rien. Il faut préciser qu’entre le décès d’une personne et la venue du notaire royal, il pouvait se passer des semaines, voire des années !

 

Mais revenons un peu en arrière, Laurens Mazé, qui s’était attribué le « sieur de Launay », est le principal protagoniste en 1732 d’une « affaire ». Un long procès nous apprend par le détail, qu’il a abusé d’une voisine, jeune fille un peu simplette, et qu’un enfant est né de leurs relations. Condamné à être saisi de justice, mais prévenu largement à temps, il est absent lors de l’interpellation à son domicile.

 

Affaire Mazé-Launay / Kervajan, série 11B  ADF Brest, procédures criminelles Saint- Mathieu. 1732.

 

L’intérêt de ces comptes-rendus de procès, réside dans la multiplicité de détails sur la vie quotidienne au Conquet qu’on y relève.  Dans tous les cas, les « enquêteurs » s’installent pour un ou plusieurs jours, et toute personne qui a quelque chose à révéler doit impérativement témoigner, sinon risque d’être poursuivie comme complice. La peur est telle que plusieurs individus s’empressent de venir dire qu’ils n’ont rien vu, rien entendu.

L’appel à témoignage avant les premières auditions est annoncé au prône de la grand-messe. En cas d’insuffisance de témoignages, on publie les « réaggraves » qui rendent coupables ceux qui ont négligé les premières audiences.

 

Le fond de l’histoire : Laurens Mazé-Launay est accusé d’avoir à plusieurs reprises abusé d’une voisine, Marie-Catherine Kervajan, jeune fille un peu sotte (selon la rumeur publique), qui se retrouve enceinte.

 

C’est la mère de la victime, Ambroise Russaouen, épouse d’Yves Kervajan absent en mer, qui soutient l’accusation au nom de leur fille, victime de subornation.

 

15 juin : Comparait la jeune fille, Marie-Catherine Kervajan, 20 ans, taille moyenne, cape de camelot brun, robe de chambre et tablier d’étamine bruns, coiffe unie et souliers noirs, demeurant au bourg du Conquet.

Déposition :

Elle passait revenant de la fontaine « doumar ? » avec du linge, devant la fenêtre de la cuisine de Mazé Launay qui la vit et la fit entrer puis poser le linge sur une chaise et la fit s’asseoir sur une autre. Il lui offrit une prise (tabac en poudre) qu’elle accepta. La mère Launay était absente. Puis il la renversa sur la table qui était fort basse et lui mit la main sous ses jupes et jouit d’elle sans qu’elle put s’en défendre. [Elle déclare] qu’elle voulut d’abord crier mais qu’il lui mit la main sur la bouche pour l’en empêcher, lui recommanda de ne rien dire à sa mère, ni à personne, et qu’on faisait de même à toutes les filles pour se mieux porter, et il la fit sortir.

 

Quelques jours après, étant à sa porte filant sa quenouille, Mazé se présenta sous le ballet (petit toit au-dessus d’une porte)  où on expose la viande à vendre. Il la fit entrer chez lui et la prit sur un banc dossier. Une autre fois, elle allait à la chapelle Sainte-Barbe, il l’invita chez lui et la même chose se passa sur le lit dans la cuisine.

 

Place du Marché, les commentaires  vont bon train … Les femmes sont les plus nombreuses à s’exprimer.



La place du Marché dessin de Louis
Le Guennec, d'après Lesage.


 













Anne Quoniam, veuve, marchande, 50 ans, qui était chez Marie Moal, veuve de Joseph Provost, marchande de vin en gros, filant sa quenouille près de la fenêtre qui donne sur la place du Marché, lui dit : « venez voir Marie Moal les deux jolies personnes qui s’entretiennent là ! » et elle vit le dit Mazé debout et Marie Catherine Kervajan assise sur une pierre près de  sa boutique, qui causaient.

Kervajan passe pour sotte parce que Catherine Siviniant a dit que son mari, Noël Le Verge vit un Anglais qui marchandait une poule à la dite Kervajan, il en offrait 6 sols, elle n’en voulait que 3 !

 

A la fontaine de Portez, plusieurs femmes en parlent en lavant le linge au doué.

 

A la suite de la première série d’auditions, il est ordonné à la dite Kervajan de se faire examiner par un médecin. Toujours courant juin, une matrone de Brest comparait devant les enquêteurs et déclare qu’elle a trouvé Kervajan enceinte de 7 mois.

 

Sans date, Catherine Salaun, femme de François Sévère, matelot, un jour de dimanche, remarqua de sa fenêtre qui est vis-à-vis de la rue sur laquelle donne la maison du dit Mazé, la dite Kervajan assise près de la porte de Marie Françoise Campion, qui parlait à quelqu’un dans l’entrée, qu’elle ne voyait pas. Puis elle vit Kervajan partir vers la chapelle Sainte-Barbe et Mazé mettre sa tête à la fenêtre d’en-haut,  sortir et partir vers la chapelle Saint-Christophe.

Elle dit alors à Marie Françoise Campion d’aller avertir le recteur.

 

Donc l’une part par la rue Etroite, et l’autre par la  rue Saint Roc’h et descend…

 

Marie Mesgoff, jeune fille, domestique chez monsieur de Poulconq au bourg du Conquet, vit Kervajan qui redressait sa barattée de linge sur sa tête devant la porte de Mazé. Ensuite elle a vu sortir Mazé d’à côté mais ne sait pas de quelle porte, elles sont deux contigües.

Kervajan a continué en direction de la fontaine « donmar ? ».

 

 

Audition d’autres témoins début juillet 1732.

 

Marie Françoise Le Campion, 33 ans, jeune fille, maîtresse d’école dépose ainsi que tous les autres en breton : environ la mi-carême elle a su par Catherine Salaun que cette dernière avait vu quelques fois Kervajan devant chez Mazé et en avait averti le recteur.

 

Anne Campion, jeune fille, lingère, 29 ans, n’a rien remarqué

 

Marie Mazé, 15 ans, qui n’est pas parente avec Mazé-Launay, a vu Launay seul le jour de la Saint-Pierre vers la redoute, à la franchise du Téven. (Dunes des Blancs-Sablons)

 

Jacques Labbé (dit la joye), gardien à la pointe des Renards, sa femme et Azénore Déniel, dans le même bateau que le couple en question, qui les traversait (entre le Croaé et le Cosquiès) pour aller au pardon de la Saint-Pierre à Ploumoguer, ont vu Launay et Kervajan rester ensemble. Ils s’en sont moqués  car Kervajan passe pour une imbécile, et elle avait des tâches de puces sur ses manches.

 

Cécile Le Guilcheur, 50 ans, femme de Christien Créac’h, maître de barque, n’a rien remarqué.

 

Marie Causeur, jeune fille, servante de Jean Mazé au bourg du Conquet, n’a rien remarqué.

 

Etc   

 

Il est ordonné que la dite Kervajan soit visitée par un autre chirurgien juré, pour une plus grande vérification de sa grossesse. Commis d’office, ce sera Pierre Navarre, demeurant à Brest. En fait c’est un autre praticien qui assure l’expertise : le 4 juillet, le médecin, Gabriel Le Blanc a visité Kervajan, lui a trouvé le sein fort gros avec du lait dedans, et par le gros de son ventre et par le mouvement de l’enfant dedans et par le lait de ses mamelles l’a déclarée enceinte de 7 mois ½

 

Les juges déclarent Laurens Mazé-Launay coupable.

 

Le mardi 9 septembre 1732, jour de Marché, fête de la Nativité de la Vierge, Tanguy Hervé Ollivier, audiencier à la cour royale de Brest, en compagnie du sergent de la juridiction de Saint-Mathieu demeurant à la Trinité en Plouzané, et un aide de justice de Lambézellec, se place à l’endroit ordinaire des bannies et proclamations de justice. Vincent Desserant, tambour de Brest, demeurant rue des Sept-Saints, bat la caisse à défaut de trompe. La foule s’amasse.

Mazé est décrété de prise de corps pour être conduit à Pontaniou, attendu qu’il n’y a pas de prison à Saint-Mathieu.

La proclamation est renouvelée devant chez Mazé-Launay qui ne sort pas. La feuille est clouée sur sa porte, portant ordre à huitaine de se rendre à Pontaniou.

Mais déjà le 8 août, il était dit que Mazé était absent du Conquet depuis six ou sept semaines.

 

4 octobre 1732, un nouveau courrier à monsieur le sénéchal, seul juge de Saint-Mathieu, on y apprend que Mazé a été décrété de prise de corps  pour avoir séduit et abusé Marie Catherine Kervajan.

Celle-ci, selon sa mère, a confirmé les faits, même dans les douleurs de l’enfantement, réputées péril de mort.

L’enfant est alors en nourrice à Porsmilin à 6 livres par mois, la grand-mère du bébé Ambroise Russaouen demande à la justice d’obliger Launay à payer cette somme.

 

Le dossier n’en dit pas plus. Launay est-il incarcéré quelques temps ? Rien ne le prouve.

 

Ce que je sais :

 

L’enfant : son acte de baptême est particulièrement intéressant. D’abord on lui donne en premier prénom celui de son père supposé :

 

Laurens-Mathieu, fils naturel de Marie Catherine Kervajan, fille de Yves Kervajan, maître esté de barque, et d’Ambroise Russaouen, et d’un père inconnu, jusqu’à finition du procès. Né le 24 septembre 1732 selon le rapport que nous ont fait Barbe Pichon, femme d’Hamon Cadiou, ménagers du village de Kerinou, trêve de Lochrist, et Marie Lestideau, veuve, demeurant au bourg du Conquet, toutes deux sages-femmes.

 

En présence de : (on s’aperçoit que la demoiselle Kervajan n’a pas été rejetée par le milieu des maîtres de barques et bourgeois du Conquet, bien au contraire), Jeanne Guitton, veuve de François Keriou, en son vivant maître de barque,  de Marie Amis, épouse de honorable homme Tanguy Lespagnol, maître de barque, de Françoise Bisien, épouse d’Hervé  Le Bourhis, marchand mercier, de Jeanne Laot, épouse de François Keranuran marchand de drap de la paroisse de Saint-Renan.

Le petit Laurens-Mathieu a été tenu sur les fonds baptismaux par maître Cézar Le Gléau, bourgeois et notaire royal et par demoiselle Françoise Keriou, veuve du sieur Valentin Michel. La mère Ambroise Russaouen était aussi présente au baptême, le père Yves Kervajan était absent en mer.

 

Laurens Mazé-Launay, le retour, le mariage, le décès.

 

Convaincu qu’il ne risque rien, que sa réputation n’est pas entachée, il réapparaît très vite au Conquet et épouse Jeanne Elisabeth Le Veille-Beaumont, fille de François Le Veille-Beaumont, chirurgien-major de la Marine.  Le couple a au moins un enfant, Cézar François Mazé né en 1735, qui héritera à la mort de son père Laurens Mazé-Launay en 1738, du « de Launay ». 

 

Jeanne Elisabeth, veuve Mazé-Launay, convole en deuxième noce, avec Noël Pohon, ancien maître de barque, puis commissaire de la Marine au Conquet et syndic des Classes.

 

Cézar François Mazé-Launay, vit avec sa mère et son beau-père. Tout naturellement, à la mort de Noël Pohon en 1764, il lui succède comme syndic des Classes. Sur le point d’être muté à Porspoder en 1767, il refuse et démissionne. On lui donne en échange la place de garde magasin d’artillerie, sans doute dans le grand bâtiment construit à l’ouest du Cosquiès une dizaine d’années auparavant. Plus tard, après la révolution de 1789, en plus de la fonction d’inspecteur des batteries, il occupera celle de procureur de la commune du Conquet, nommé le 9 novembre 1792. (Je passe sur son activité pendant la Révolution, j’en reparlerai dans un autre sujet).

 

En 1754, Cézar François Mazé-Launay a épousé Catherine-Josèphe fille de Cézar Le Gléau, notaire royal au Conquet.

 

Le couple a eu de nombreux enfants dont :

 

-Noël Marie Mazé-Launay, né le 7 mars 1756, capitaine de commerce, 1787/92  à bord du Coureur.  Il prête serment à la République et obtient son brevet d’enseigne des vaisseaux, le 29 décembre 1792,  « je jure de maintenir ….    puis après l’an XI, inspecteur des signaux depuis le Portzic jusqu’à Saint-Mathieu, marié en 1780 à Marie Jeanne Lannuzel, puis en 1791 à Marie Créac’h dont il a eu au moins un fils Christien-Joseph Mazé-Launay, né en l’an III de la République et une fille née au Conquet le 7 frimaire an V, Marie Margueritte Mazé-Launay.

 

Noël Mazé-Launay est mort au Conquet le 28 mars 1822, âgé de 66 ans, Marie Créac’h elle a vécu jusqu’à 90 ans, puisque décédée en 1846. Les deux époux sont réunis sous l’une des plus vieilles pierres tombales du cimetière de Lochrist. La dédicace de lettres en fort relief, sculptée après la mort de la dame, comporte une étonnante erreur qui attribue à son mari le prénom d’Emmanuel au lieu de Noël !

 























-François Marie Mazé-Launay né en 1758 - ?

 

-Jean René Mazé-Launay, né en 1761, capitaine de commerce, commande en particulier le Gordon en 1789, au sieur Edern de Recouvrance.

 

-Christien Marie Mazé-Launay, né en 1762, reçu maître en 1787, capitaine de commerce, commande la Marie-Jeanne de 1788 à 1794.

 

- Cézar Yves Marie Mazé-Launay, né en 1764, clerc tonsuré, prêtre assermenté, vicaire de Recouvrance en l’an IV, touche la pension ecclésiastique, 800 livres par an  comme curé de Guipavas en l’an V

 

- Une fille mariée au citoyen Mevel  (note du 7 juin 93)

 

- Peut-être une autre fille Marie-Gabrielle Mazé-Launay, épouse Provost (vérifier)

 

Cézar François Mazé-Launay est mort le 28 fructidor an III environ 5 heures du soir, dans la maison commune (mairie) du Conquet. Déclaration par ses fils Noël et Cézar (ministre du culte).

 

Notes diverses concernant les Mazé-Launay

 

30 janvier 1813, Christien Joseph Marie Mazé-Launay, né au Conquet le 27 frimaire an III, assisté de son frère Noël,  ancien enseigne de vaisseau, a déclaré vouloir servir dans le 16e équipage de la flottille impériale de la Marine.

 

30 décembre 1817, Le Conquet : Mazé-Launay nommé adjoint-maire, par arrêté préfectoral

 

1829, décès de Eugène Marie Provost, 20 ans, aux hôpitaux du lazaret, ville de La Seyne, fils  de Michel Marie Provost et de Marie Gabrielle Launay, marin embarqué sur la gabare du Roi Le Volcan.

 

Chapelle-oratoire Dom-Michel Le Nobletz : dans l’année 1837, la famille Mazé-Launay qui, de temps immémorial, a orné avec soin et généreusement entretenu à ses frais cette chapelle,  fit agrandir sans la démolir l’ancienne maison du Vénérable Michel Le Nobletz. Cette même année, monseigneur de Poulpiquet, évêque de Léon,  permit d’y célébrer la sainte messe, le 8 septembre, fête patronale.

 

 

MAZE-LAUNAY et l’exploitation des algues :

 

-1824, Christien Joseph ? Launay exploite une fabrique de soude à Béniguet (fermier Corolleur). Note : en 1819 Yves Corolleur était encore à Trielen, un bail des 2/3 de l’île lui est alors consenti pour 120 francs par Guillaume Marie Prat et autres. Donc Corolleur prend Béniguet en location entre 1820 et 1824.

 

-1840 : bail de Béniguet, commune de Ploumoguer,  consenti par les propriétaires de l’île,

Christien Joseph Marie Launay, chevalier de la légion d’honneur, négociant, demeurant à Brest et sa sœur Margueritte Launay, propriétaire demeurant au Conquet, à François Causeur et à sa femme Marie Jeanne Gilet qui prendront la succession du fermier Yves Corolleur.

 

Dans le contrat :

-Causeur prendra pour l’engrais des terres de l’île tout le goémon dont il aura besoin, mais il ne pourra jamais ni vendre ni laisser enlever pr quiconque la moindre quantité de goémon sans le consentement par écrit des bailleurs.

-Causeur se charge de l’incinération du varech non employé comme engrais et s’oblige à fabriquer annuellement 75 à 100 000 kilos de soude de bonne qualité. Les soudes seront payées après livraison, 30 francs les mille quatre kilos si ce poids est constaté sur l’île et le même prix les mille kilos si les soudes sont pesées sur le continent. Cette différence est établie pour comparaison du déchet résultant du transport. Monsieur Launay aura faculté de prendre livraison sur l’île ou sur l’une des pointes du continent qu’il indiquera, mais le fret et les risques de mer seront toujours à sa charge. Le fermier réunira les soudes fabriquées dans le lieu ordinaire d’embarquement, il s’oblige à les mettre sous palan et à aider à l’arrimage. S’il arrivait que les soudes ne fussent pas de bonne qualité loyale et marchande, le degré d’infériorité serait déterminé par expert et le fermier subirait une réduction relative etc…

 

Monsieur Launay si la baisse des prix ou tout autre motif le déterminait à faire cesser la fabrication, abandonnerait le goémon au fermier qui le vendrait à son profit. Les livraisons se feront avant le mois de novembre de chaque année mais monsieur Launay aura la faculté d’ajourner à l’année suivante, dans ce cas le fermier couvrira les soudes pour les préserver des eaux pluviales et le prix convenu serait payé immédiatement.

 

Note : Christien Joseph Marie Mazé-Launay, né au Conquet le 17-12-1794, négociant à Brest, représentant du Finistère, liste de droite, « conservateur », élu à l’Assemblée Législative sous la 2nd République, en mai 1849, 5e député sur 13,  s’est associé à tous les votes de la majorité.  Quitte l’Assemblée avec le coup d’Etat de Napoléon III,  02-12-1851. Mort à Brest le 1er août 1853.

 

Mazé-Launay possède un magasin sur le quai du Drellac’ h, endommagé par les travaux des cales. Il vend son bien pour démolition.

 

1841, la veuve Launay qui possède des maisons et terrains au Conquet (rues Saint-Christophe, rue Neuve, rue dom Michel Le Nobletz, quai du Drellac’h,… est Marie Créac’h, mère de Christien et de Margueritte.

Marie Créac’h était la fille de Laurent Créac’h et Marie Du Bosq, sœur de Christien-Joseph Créac’h, ancien capitaine garde-côtes, président du Canton puis maire du Conquet.

 

1869, Mazé-Launay propriétaire, demeurant à Guipavas demande à établir ses fours permanents pour la fabrique de soude brute de varech sur les îles de Béniguet et de Trielen qui lui appartiennent dans la commune de Ploumoguer

 

1875 : Albert Marie Mazé-Launay et Joseph Pellieux se sont associés pour créer une petite industrie utilisant les algues comme matières premières. L’usine se trouve au Petit-Cosquer à Kerhuon près de chez Mazé-Launay (plus tard emplacement d’installations ostréicoles).

 

Vie fastueuse des usiniers, la résidence de Mazé-Launay est une grande maison bourgeoise devenue depuis l’hôtel du Gué Fleuri, puis le C.I.E.L.

Productions de l’usine : iode et iodure, brome et bromure, sels de potasse et de soude, goémons secs pour l’agriculture, engrais chimiques, vente sur analyse garantie.

 

A. Mazé-Launay et J. Pellieux

Diplôme de mérite : Vienne 1876

Médaille d’argent : Paris

Usines à Audierne (Poullan)    établissement à vapeur

Laberildut (Toul ar bara)         établissement à vapeur

Portsall (Porscheffret)              établissement à vapeur

Ile Béniguet

Ile Trielen

 

1882 : faillite retentissante, orchestrée dit-on, par la concurrence (Tissier et autres), tous les biens sont vendus pour payer les créanciers.

 

***************************************************************************

 

Retour sur Marie Margueritte Mazé-Launay, née au Conquet le 7 fructidor an V, fille de Noël Marie Mazé-Launay et Marie Créac’h.

 

En 1847, messieurs Obet, Le Guerrannic, Robert Mazé et mesdemoiselles Le Bourc’h et Launay, se voient confier la gestion du bureau de Bienfaisance qui vient d’être créé.

 

Lorsque l’église est transférée au Conquet, il faut héberger à proximité les prêtres qui vont la desservir à partir d’avril 1858.

Un don à la municipalité (François Podeur, maire) de mademoiselle Marie Margueritte Launay en 1859 (4 septembre)  permet l’achat d’une maison qui deviendra le presbytère. Mademoiselle Launay a offert 3 000 francs, le reste du solde a été apporté par la vente du presbytère de Lochrist.

 

Printemps 1861 (1855 selon le site Internet de l’école privée, Saint-Joseph), mademoiselle Margueritte Mazé-Launay offre à la commune du Conquet un établissement de charité, en même temps qu’elle fait un legs pour la congrégation des Filles du Saint-Esprit : rente annuelle de 800 francs, et une maison et ses dépendances rue Kerdacon au Conquet, à conditions que deux sœurs soignent gratuitement les indigents.

 

Mademoiselle Marie-Margueritte Mazé-Launay est décédée au Conquet le 24 mai 1870, célibataire,  propriétaire, âgée de 78 ans.

 

Ici s’achève provisoirement ce récapitulatif  historique (à compléter et corriger si nécessaire) concernant la famille Mazé-Launay)

                                                                                                     JPC/ Nov 2009
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10 novembre 2009 2 10 /11 /novembre /2009 09:49

 LES CHAPELLES DU CONQUET - ND DE POULCONQ

 

La trève de Lochrist, paroisse de Plougonvelin abritait quelques chapelles publiques ou privées.

 

Chapelle de Poulconq : chapelle privée dédiée à Notre-Dame, dépendance du manoir des Le Veyer de Poulconq.

(En ce qui concerne la famille Le Veyer de Poulconq, lire les ouvrages de Yves Luzlac, Chroniques oubliées des manoirs bretons etc…)


Poul Conq : la zone marécageuse en bas du Conquet, en opposition à Gorre Conq, "montagne" du Conquet, le haut de la côte, actuellement place de Brest.


Reste des murs de la
chapelle de Poulconq
(Propriété privée)
(2009)















La chapelle n’était qu’un petit oratoire en bord de mer, d'accès peu aisé.  En 1647, frère Cyrille Le Pennec écrit :" la mer entre dedans aux grandes marées parce qu'on a laissé ruiner le quai qui l'environnait..."  On y découvre parfois des enfants abandonnés comme cette petite fille "trouvée le vingtième de janvier 1690 contre la chapelle de Poulconq, de laquelle on ignore le père et la mère", et baptisée "Marie" par le recteur à qui on l'a amenée

 

Epoque révolutionnaire : en 1791, tous les ecclésiastiques ne se sont pas encore soumis au serment de fidélité à la constitution du Royaume. Les prêtres sont divisés entre « assermentés, constitutionnels ou jureurs » et « réfractaires ». Ces derniers sont majoritaires dans l’ouest de la France.

 

Texte du serment de juillet 1790 : je jure de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution du royaume, décrétée à l’Assemblée Nationale, et acceptée par le roi, d’être fidèle à la Loi et au Roi, et de remplir avec zèle et impartialité les fonctions de mon office »

 

Devant l’agitation réfractaire, la Constituante autorise l’exercice du culte célébré par des prêtres réfractaires, mais seulement comme une pratique « tolérée ».

 

Le 26 mai 1791: Pierre Renaud, Jacques Tilly, Esprit Du Faur, Michel Helcun, Jean René Prat et quelques autres « révolutionnaires conquétois » présentent un placet à la municipalité dans lequel ils dénoncent Jacques Le Gall, ci-devant vicaire de Lochrist et Marc ci-devant vicaire du Conquet pour une assemblée suspecte qui s'est faite le 24 mai en la chapelle de Poulconq. Le Gall convoqué devant le maire explique qu'il ne s'agissait pas d'autre chose que d'une messe qu'il y célébrait, à la demande d'un particulier comme l'autorise la loi.

 

Après la fuite du roi Louis XVI dans la nuit du 20 au 21 juin 1791, la restriction de l’exercice du culte s’amplifie. Début juillet, les prêtres qui ont refusé le serment ont trois jours pour se rendre à Brest en état d’arrestation.

Margueritte Du Bosq, agissant pour le ci-devant seigneur de Poulconq, est invitée à fermer la chapelle de Poulconq.

Margueritte Du Bosq (ou Dubosq), veuve de Laurent Créac’h, bourgeoise aisée, intervenant dans les affaires religieuses, dans les procès, dans des partages fonciers, est semble-t-il une « figure du Conquet » à la fin du XVIIIe siècle.

 

L'inventaire de la chapelle fait le 17 janvier 1793 recense: 12 bouts de cierges, une nappe d'autel, deux aubes, un tapis d'autel, une chasuble avec étole et manipule blanche, une autre rouge, une autre noire, une autre violette et blanche, 5 devants d'autel de différentes couleurs, 7 nappes d'autel, quatre amicts, un cordon, quelques essuie-mains, du petit linge de calice, et deux cloches descendues depuis décembre 1792.

La citoyenne Du Bosq qui détient les clés est alors interrogée le maire François Monté et l'Agent National César François Mazé-Launay*, sur la disparition d'un calice. Elle répond l'avoir fait amener à Quimper par la citoyenne Carquet.


*(Article en préparation : la famille Mazé-Launay et Le Conquet)
 

Contestation de propriété

 

3 floréal an III (mars 1795) : la municipalité déclare que le bâtiment lui appartient, ayant toujours été considéré comme un bien public. "La chapelle est absolument dans la grève, au point qu'on ne peut la fréquenter que dans la morte-eau. Cette chapelle n'a toujours été entretenue que par les âmes pieuses de la commune, nous ignorons son origine et ne connaissons pas la personne qui prétend aujourd'hui s'en emparer, en s'en disant propriétaire".

 

La citoyenne Du Bosq qui détient les clés est alors interrogée le maire François Monté et l'Agent National César François Mazé-Launay, sur la disparition d'un calice. Elle répond l'avoir fait amener à Quimper par la citoyenne Carquet.

 
Bâtiment agricole ou dépendance

En 1818, le bail de la ferme de Poulconq est consenti par monsieur le comte d’Augier à Pierre Podeur pour 360 francs. La chapelle à l’époque a perdu sa fonction religieuse.
 

Au cadastre de 1841, elle est qualifiée de masure N°589, avec le terrain en bord de mer, Parc ar Chapel N° 588, elle appartient à madame veuve Arnoult à Pont-Labbé. Le manoir N° 590 est toujours à monsieur d'Augier à Paris


Potager

Après la perte de son toit, et de la partie haute de ses murs, la nef de la chapelle est devenue un petit jardin bien abrité, clos de murs.

 


L'accès public à la grève (2009)












L’accès à la grève :

Après de longs démêlés avec l’administration, les gestionnaires de l’usine Tissier obtiennent en 1875, moyennant finances, l’autorisation de barrer l’anse de Poulconq par un mur et de la combler. A condition entre-autres, de laisser un passage public de la route de Brest à la grève, et de ménager à l'extrémité, un accès en pente douce, accessible aux charrettes fréquentant le port du Conquet.

                                                                                     JPC, novembre 2009

 

 

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6 octobre 2009 2 06 /10 /octobre /2009 10:39

cantonnement-1971.jpgL'APRES-GUERRE

 

Lente reprise de l'activité pêche dans un port en ruines

 

Jeudi 4 juillet 1946, "Le Télégramme": "Au moment de la Libération les Allemands firent sauter la moitié de la flottille de pêche et tous les ouvrages du port du Conquet, le môle-abri de l'avant-port (ou digue de la Pierre-Glissante), le môle St-Christophe avec sa cale d'accostage, les deux cales du Drellac'h, la cale et l'abri du canot de sauvetage.

 Pour permettre aux pêcheurs et marins d'accéder à la cale et au môle St-Christophe, une passerelle construite par les Ponts et Chaussées en 1945, reliait la terre ferme au môle détruit sur 25 mètres. La tempête du 17 décembre dernier aggrava les dégâts en occasionnant une brèche supplémentaire d'une quinzaine de mètres. Les travaux de réparation sont en cours."

      

  

Au lieu de prendre de l'ampleur avec le retour à la vie normale, l'activité pêche du Conquet s'étiole.

 

Le 8 juin 1948, Jean Harlé écrit dans "Le Télégramme":   "Il y a au Conquet 22 bateaux à moteur, 14 bateaux à voiles, 72 marins. On part de bon matin sur les 5 à 10 tonneaux, à trois hommes, pour la pêche à la langouste et au homard, en jetant un regard jaloux vers Molène qui a remplacé Le Conquet dans les grandes randonnées vers la côte anglaise. On pousse une petite visite à Béniguet puis c'est tout. La voile elle, demeure près des côtes. L'unique marin qui la largue est le plus souvent un vieux retraité qui s'en va faire une petite provision de crabes et d'araignées. Le poisson qu'on cueille au hasard des pêches sert d'appât et regagne les casiers. »

 

pcma.jpg



































Le Conquet, le plus petit port de pêche de la côte nord, est sans ambitions, alors naturellement il vit sans crédits.

 

                              Statistiques des pêches:

                        Homards      Langoustes       Divers     Total

  1947                   12t               21t               16t             49t

  1948                   13t                 9t               86t           108t

  1949                   12t                 7t               67t             86t

  En 1938, les apports homards + langoustes approchaient les 89 tonnes

 

En 1949 on dénombre au Conquet 62 marins pêcheurs pour 32 bateaux, le tonnage moyen des embarcations est de 5 tonneaux, pour un total flottille de 150 tonneaux.

 

pcma-port-avec-asta-buen-det.jpg
Vers 1950
Bateau clair premier plan à gauche : St-Yves Br 6894, à Yves Le Bris. Premier plan à droite : Ste-Anne Br 6042, à Henri Abily, vendue en 1960 à Charles Bernugat. Derrière, à demi-cachée, Etoile du Nord à François Grovel. Au troisième plan, Br 5671, Asta-Buen à Yves Le Bris (Père de François et Yves). Le bateau a été détruit par une tempête en 1960-61. En arrière plan à gauche, Janua Caeli à Michel Guillimin.


Un drame :

7 juillet 1949: recherche des disparus du « Petite Soeur Thérèse ».

Le patron du canot de sauvetage Docteur Paul Le Dien, est prévenu à 11h50 que le bateau de pêche « Petite Soeur Thérèse » vient de couler en baie de Porsliogan à 1/2 mille de la côte.

Louis Marec, patron du  Mon Rêve, témoin du drame, venait après des recherches infructueuses de rentrer au Conquet pour donner l'alerte. Les investigations par le canot de sauvetage n'ont rien donné, on déplore deux disparus : Théophile Minguy et son frère Joseph.


Le soir un scaphandrier de Brest opérant à partir de la gabare  Paul-Georges  retrouve le petit sloup qui est aussitôt renfloué.


« Petite Soeur Thérèse »: Br 5756, construit en 1935 à Carantec, 4,77tx, moteur 5/6cv à essence.
L'épave intacte, sera acquise et remise en état par Charles Bernugat. Le naufrage s'était produit voiles hautes ; suite à cet accident on rapporte que des pêcheurs conquétois dont les navires étaient motorisés, ont sectionné leur mât.



LES TRAVAUX DE REMISE EN ETAT DES OUVRAGES PORTUAIRES SONT TERMINES MAIS LE DECLIN DE LA PECHE AU CONQUET S'ACCENTUE.

 

1950-51, les travaux de remise en état des ouvrages portuaires sont achevés. Le conseil municipal soutient les pêcheurs dans leur demande d'une meilleure protection du port par l'allongement de la digue Sainte-Barbe. L’administration lui répond: "la valeur du produit débarqué au Conquet en 1948/49 s'élevait à 10 millions de francs, en 1950 elle atteint seulement 6,5 millions, il n'est pas question pour l'Etat de financer l'allongement d'un môle, pour un port ou le trafic pêche est si minime."

 

Le déclin continue, si en 1950 la flottille conquétoise compte encore 37 bateaux dont 25 sont motorisés. En 1951, elle est réduite à 27 unités dont 21 motorisées. Beaucoup ne sont que des canots montés par un seul homme.

1951 est  une année noire pour les pêches côtières bretonnes, à Molène par exemple le métier rapporte si peu que sur 136 pêcheurs, 22 abandonnent pour aller naviguer au commerce.

 


A l'échouage dans l'est de la cale carrée :
pcm-cale-carree.jpg
1950, au premier plan, Ave-Maria, Br5341, sloup construit à Plouguerneau, en 1931, pour Menguy Pierre, natif de Brélès. Acquis en 1940 par Yves Marie Lucas, puis en 1946 par Aristide Lucas. Vendu en 1951 à Le Bot, Logonna-Daoulas.

Au 2e plan, Reine des Flots, construit à Plouguerneau en 1931,
pour Balcon François Marie (père) puis fils, moteur Berliet 15 cv, à essence. Vendu en 1952 à Gautret Le Trez-Hir, plaisance.







UN ESSAI DE DIVERSIFICATION: LA COQUILLE EN RADE DE BREST :

 

Pour essayer de sauver financièrement leur année, un certain nombre de patrons du Conquet achètent des dragues et partent l'hiver 1951-52 faire la pêche à la coquille Saint-Jacques en rade de Brest. Le moteur  y est autorisé depuis 1948 mais les puissances ont été bridées à 10 puis 15cv, d'autre part les "motorisés" n'ont droit qu'à une seule drague quand les voiliers peuvent encore en tirer deux.

 

C'est d'ailleurs un  bateau conquétois, le Roturier, qui sera équipé du premier cabestan. "Ce n'était pas une si bonne idée se souvient Louis Marec, on passait notre temps à décrocher du fond les dragues des uns et des autres au lieu de pêcher » pcma-roturier-gris.jpg


Ci-contre, photo très dégradée du Roturier
Br 6756, 8,46 tx construit en 1931 à Camaret pour un Molénais, François Tanguy. Moteur 12cv diesel. Acquis par Louis Marec en 1950, désarmé et démoli en 1953. 

 




pcma-cabestan.jpg

Le cabestan "bobine horizontale", tournant sur un axe, attelé au moteur du bateau,  a remplacé la remontée de la drague à la force des bras. Photo ci-contre prise au Tinduff, rade de Brest.








A la "pointe des blagueurs"* le passé fait les frais des conversations, à défaut d'avenir.


François Péron dans "Ouest-France" du 16 janvier 1953 fait parler François Le Boité, Fanchic et Ny Grovel et d'autres anciens, tous disent  " ...voyez-vous le port est vide… trois ou quatre barques... les pêcheurs sont à Brest à la coquille. Ils reviendront bientôt faire le crustacé mais le métier ne paie pas. La langouste et le homard se font rares dans les parages. Les jeunes vont au commerce ou bien en ville où ils apprennent un métier. Du côté de Kerjan il y a plusieurs bateaux à sec qui sont en train de manger de l'argent à se fendre au sec. Il reste aussi quelques ligneurs et il y a un Kerhorre qui dans les îles, au tramail ou à la senne, fait de temps en temps de bons coups de mulets ou de bars."


(*Ndlr : "Pointe des blagueurs" au Conquet, petit mur de la place Saint-Christophe qui surplombe la digue. Appelé aussi "mur des lamentations" ou "quai de la médisance")

La Mouette, sloup à moteur 10/12 Baudouin, 3,48 tx, construit à Camaret en 1943, à Jean Marie Le Bris en 1958.


Il y a peu de choses à dire de la période 1955-68, le nombre des bateaux évolue peu, leur tonnage ne croit que très lentement, le nombre de  pêcheurs ne subit pas non plus de grandes variations.  L'activité pêche reste la même.                  

 

 pcm-balbeck.jpg

Dernier voilier de pêche professionnelle au Conquet : Baalbeck, un petit sloup "passavanté", Br 6482, à Alfred Le Gall. Il a dû être désarmé en 1962 au Croaé, d'où il a un jour disparu sans trace.
Construit à Labervrac'h en 1931 pour la plaisance. Acquis par Alfred Le Gall en 1945.



























LA FLOTTILLE EN 1961

 

   Nom du navire                  Tonnage

   Kanaouen ar Mor                    2.58

   Jeannot                                    5.59

   Sainte-Marie                           5.86


pcm-ste-marie-goaster.jpg
Sainte-Marie, Br7186, construite en 1957 à Brest pour Jean Le Goaster, puis acquise en 1964 par Francis Appriou,  et en 1969 par Michel Le Gall. En 1988, le bateau naviguait toujours à la pêche à Lampaul-Plouarzel.
  










   Nd de Lourdes                        5.42

   Kanaouen ar Mor                    3.43

   Sainte-Thérèse                        2.29

   Stereden Breiz                        7.41

   Baalbeck (dernier voilier)     1.25

   St Yves                                    2.79

   Ste Anne                                  5.51

   Marie Claire                           1.81

   Vigilant Insulaire                    7.53

pcm-vigilant-insul.jpg
Le Vigilant Insulaire, construit au Conquet en 1928, pour Olivier Floc'h de Quémenes, puis acquis par René Talec. Armé à la pêche par Alexis Vaillant en 1959. On voit passer derrière La Perle à Botquelen.
   






   Etoile du Nord                        2.38

   Lutin                                        2.52

   Touille                                     5.59

   Anne Marie                             3.41

   Petite Hélène                          6.68

   Dom Michel                           5.53

   Ave Maria                                3.81

   Jean                                          1.79

   Pax Vobis                                2.34

   Sainte Anne                             2.35

   Saint Christophe                     1.60

   Jackie                                      1.75

   Minick                                     5.64

   Général de Gaulle                  2.93

   Rien sans Peine                      2.14

   Elan                                          4.95

   La Tzigane                               5.53

   Joyeux Pêcheur                     15.74



pcm-joyeux-pecheur-croae-copie-2.jpg
Br 7379, Joyeux Pêcheur à Yves Le Gall; moteur Bolinders diesel 75 cv. C'est en allant le prendre en remorque du côté des Pierres Noires, que le Cs Rigault de Genouilly s'est déchiré sur son berceau au lancement
en 1962 et par suite a été condamné.












RETOUR SUR LA CONSTRUCTION NAVALE : LE CHANTIER MIRIEL 1953-1969

 

 

Gilles Miriel associé à Emile Le Bris se lance dans la construction navale au début des années 50

,
trezconq10-30.jpg
 trezconq11-30.jpg


 Premier bateau : Saint-Yves 2.79 tx, moteur Bolinders   6cv pour Yves le Bris en 1951).










En 1953, Miriel achète à Belbéoc'h sa cabane-chantier du Croaé, il y exercera son activité avec pour compagnon charpentier Eugène Paugam jusqu'en 1969.

 

Lancement des navires neufs :

 

Les bateaux construits dans le hangar sont sortis par le camion à Eugène Magueur (véhicule GMC des surplus américains de la guerre), et trainés sur la grève à marée basse. Une planche épaisse saisie sous le flanc et des rouleaux sous la quille empêchent les frottements sur les cailloux. Le flot soulève le bateau qui peut ensuite être remorqué dans un endroit propice à l'achèvement de son armement.

 

                 Quelques unités conquétoises sorties de chez Miriel :

 

1959: Notre dame de Lourdes     Br7301   5.50tx   mot. Baudouin 40 cv pour Yves Le Bris


pcm-nd-lourdes-bapt.jpg

pcma-lourdes-bapt-rte.jpg








Baptême du Nd de Lourdes


1960: Petite Hélène       Br7320   6.68tx   mot. Baudouin 24/28 cv pour Louis Marec


 1964 San Josef             Br7370   4.64tx   mot. Baudouin 24 cv pour Alexis Vaillant

pcm-stereden-bz.jpg



1964: Stereden Breiz     Br7352   7.41tx   mot.       ?       30 cv pour Yves Quéméneur. Puis André Quémeneur.
Photo JPC vers 1976

Le bateau a reçu une timonerie depuis quelques années déjà.
Br 267679 de 1975.
 







    

    

pcm-gwerchez-vari.jpg
1964, Gwerc'hez Vari   Br7450   4.87tx   mot. Perkins 32/35 cv pour Marcel Riou







       







Etoile du Matin   Br7469   5.04tx   mot. Bolinders 44 cv, pour Jean Le Goaster, bateau lancé le 14 février 1964, (9e de la série des 8,35 m) .                                                                                              

 


pcm-kerivin-jean-bris.jpg1965: Christian Marie  Br7532  10.70tx  mot. diesel 80cv, pour Jean Marie Le Bris (debout à l'étrave)


 













Tous ces navires sont armés à la petite pêche, aux casiers pour les crustacés, pendant la morte-eau. Ils partent tôt le matin et rentrent dans le courant de l'après-midi ou en soirée. L'hiver ils sont pour la plupart, à la coquille en rade de Brest.

 

 QUELQUES IMAGES DE BATEAUX DE CETTE EPOQUE :

mari-franceza.jpg

Mari-Franceza, Br 7414, Roger Bernugat a eu ce bateau en 1964-65.
Photo Bernard Rivière













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Petit-Yvon
Br 7439 à Charles Bernugat

Photo Bernard Rivière













louison-bobet.jpg

A quai à la cale Saint Christophe Louison Bobet, patron armateur Gérard Le Noach.
(photo Bernard Rivière). Le bateau a fait naufrage près des Scillies, le 4 août 1965 dans la matinée. Equipage sain et sauf.

(J'en reparlerai).

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pcm-jpetite-hln.jpg
Petite-Hélène, photo vers1969, caseyeur lancé au Conquet en 1960, le 16 mai, pour Louis Marec. Moteur 24/28 Baudouin essence à l'origine, puis en 1967 50cv gasoil.

Collection Alain
Brenterc'h.

   



    

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pcm-santez-mari-san-josef.jpg
Au premier plan Santez-Mari, construit au chantier Daniel à Paimpol pour Christian Riou. Au second plan le San Josef d'Alexis Vaillant. Photo JPC 1974.
























pcma-brenter-petite-hln-face.jpgBr 7439, Petit-Yvon.   au second plan, Chantal-Gwenaelle BR 7633, à Jean Claude Lucas (juillet 1968). 
Collection Alain Brenterc'h









ESSAIS DE REPEUPLEMENT DES FRANGES CÔTIERES.

 

CREATION DE CANTONNEMENTS:

Zones réservées interdites à la pêche, cette solution a donné lieu à un essai dans les parages de Molène en 1961. Devant les résultats estimés positifs, une série de cantonnements a été installée le long du littoral. (Le Conquet 750 hectares en 1966).

Dans ces cantonnements on immerge des femelles grainées, de langoustes ou de homards, ou bien des "bébés-homards" élevés en écloseries jusqu'au cinquième et sixième stade, à l'île d'Yeu ou à l'île d'Houat. Les premières larves de homards (âgées d'un ou deux mois), ont été déposées au fond de l'eau par des plongeurs dans le cantonnement du Conquet en automne 1971, environ 10 000 juvéniles. L'expérience s'est prolongée pendant une dizaine d'années puisqu’en 1979, ce sont 20 000 homards qui ont été immergés au Conquet.


 cantonnement-1971.jpg

 


Ci-contre, une photo illustrant le 17 février 1971, un article du Télégramme titré :

Les marins-pêcheurs du Conquet :
"Les professionnels ne peuvent qu'être favorables aux cantonnements de crustacés"

Et sous la photo : monsieur J. Audouin, chef du laboratoire de l'ISTPM de Roscoff et un pêcheur du Conquet procèdent à l'immersion de homards grainés















ESSAIS DE DIVERSIFICATION DES PECHES

C'est aussi à cette période 1970-73 que quelques pêcheurs conquétois se sont associés pour travailler les huîtres en rade de Brest. La coopérative qui s'était dotée d'un matériel important, (camion-grue etc..) a dû suspendre son activité en raison de la parasitose des huîtres de la rade de Brest.

 

LE BOULEVERSEMENT DES  ANNEES 1970 :

                                                        deux évènements...

 

1/La découverte (ou la redécouverte) de la fosse d'Ouessant

 

Un marin-pêcheur conquétois, Yves Le Gall, qui vient de tenter plusieurs expériences de pêche et de transports de crustacés avec un ancien langoustier camarétois l'Enfant-d'Arvor, s'est fait construire en 1969, un bateau rapide à silhouette de vedette:  Flèche Blanche, avec lequel il va pratiquer la pêche aux tourteaux aux abords d'Ouessant. Les fonds sont riches, la demande du marché est forte, cette initiative personnelle  va bouleverser et dynamiser le petit monde de la pêche conquétoise.

 pcm-enfant-d-arv.jpg

1968, l'Enfant d'Arvor à quai et à couple la Petite Annick, BR7420 à René Normand, puis en 1967 à Jacky Vaillant.

On aperçoit en arrière-plan le San-Josef

Photo collection Alain Brenterc'h










2/Le prolongement de la digue Ste-Barbe


En 1970, on ne recense au Conquet outre Flèche Blanche, que deux bateaux aptes à travailler de l'autre côté d'Ouessant avec un nombre suffisant de casiers et dans des conditions de sécurité convenables: Bonne Marraine à Yves Le Bris et Saint-Mathieu à Henri Minguy.


bONNE-MARRAINE.jpg





La Bonne Marraine à Yves Le Bris, armement du 1er juin 1965. Br 7508, moteur Baudouin 100 cv, puis Baudouin 180 cv. Photo Bernard Rivière. 
Caseyeur devenu plus tard Sparfel à Marcel Vaillant.























D'autres patrons-armateurs ont peut-être eu depuis longtemps l'envie d'acquérir une unité plus importante? mais l'absence de protection du port les en dissuadait.

 Souhaitée depuis 20 ans c'est seulement en 1970 qu'est inaugurée la nouvelle digue Ste-Barbe. Construite dans le prolongement de l'ancien môle pour permettre l'accostage de l'Enez-Eussa, courrier d'Ouessant, elle offre désormais un abri à la "rade" du Conquet et permet d'y installer des corps-morts pour les bateaux de pêche. (Voir dans les sujets de ce blog "Pointe Sainte-Barbe")



Rapidement on voit quelques navires d'occasion venir renforcer la flottille
, puis à partir de 1974 chaque année apporte son quota de bateaux neufs ou d'occasion, pour des tonnages croissants et des puissances de moteurs toujours plus fortes.

 

  

                                                      

                     1974      La Paloma          9.30 tx   à Aristide Lucas

                                   Saint-Ronan     14.04 tx   à  Jacques Le Coz

                                   Santez Mari       8,24 tx   à  Christian Riou


pcm-paloma-coquilles-oct-1974.jpg

Ci-dessus : La Paloma BR 157155 en octobre 1974, drague aux coquilles en rade de Brest, photo Ouest-France.

                    

                        1975    Petite Hélène    15.42 tx  à  Louis Marec

                                    Azalée               17,16 tx  à  Louis Provost

                                    Bugel ar Conq   21,70 tx  à  Joseph Vaillant

                                    Men Du             25,66 tx  à  Yves Le Bris

                                               Etc...

 LES ANNEES "CASIERS":


CASIER-RIVIERE.jpg
Casiers et nasses sur la cale Saint-Christophe, photo Bernard Rivière.













Chaque navire mouille maintenant plusieurs centaines de casiers, cette augmentation brutale de l'effort de pêche se traduit immédiatement par un tonnage annuel de prises multiplié par quatre.

 

De 1958 à 1973, le tonnage total débarqué au Conquet, tourteaux plus araignées varie de 144 tonnes en 1959 année la plus faible, à 360 tonnes en 1969, année la meilleure.

 

En 1974 les apports ne sont encore que de 488 tonnes dont 330 tonnes de tourteaux, mais en 1975, c'est le grand bond en avant: 1 328 tonnes débarquées dont 1 200 tonnes de tourteaux!

 

 

Autres chiffres significatifs:             1972,    94 marins pour 33 bateaux d'une jauge totale de 214 tx

                                                    1975,   111 marins pour 31 bateaux d'une jauge totale de 354 tx

 

Jusqu'au milieu des années 80 la course aux armements continue, les bateaux les plus importants se tiennent juste au-dessous de la limite administrative des 30 tonneaux..

                              

                                          Gwerc'hez Benniget      29 tx,    à Marcel Riou

                                            Loo Mazé                  27 tx     à Louis Provost

                                            Men Glas                   29 tx     à Jean Le Bris

 

L'augmentation constante des tonnages et des puissances des moteurs est la conséquence d'une diminution  rapide de la ressource. Pour maintenir le volume de ses captures, le pêcheur doit augmenter le nombre de ses casiers, cela passe bien souvent par l'achat d'un bateau plus grand, et la nécessité d’aller toujours plus loin, d'où une remotorisation nécessaire (en 1984 puissance totale de la flottille 4 553 cv, en 1985, plus de 1000 cv supplémentaires!)... Il faut maintenant aux plus gros bateaux plus de quatre heures de route pour arriver aux lieux de pêche.


   

 

        Augmentation du nombre des marins, du nombre des bateaux, de la jauge totale

                  1983                   110 marins pour 34 bateaux, jauge totale 352 tx

                  1986                   121 marins pour 39 bateaux, jauge totale 477 tx

                  (La moitié des pêcheurs du Conquet ont alors moins de trente ans)


A SUIVRE  JPC 


Nb, il est évident que si j'ai commis des erreurs ou des inexactitudes, il faut me les signaler :  jean.pierre-clochon@wanadoo.fr

 

     

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4 octobre 2009 7 04 /10 /octobre /2009 18:03

LA PÊCHE PENDANT LES ANNEES D'OCCUPATION
                                   1940-44

 

Fin 1939, on recense au Conquet une gabare le Paul-Georges appartenant à Prosper Gouachet de Plougonvelin, 32 bateaux de pêche allant du canot Normandie jaugeant moins de un tonneau à Victor Riou, au langoustier Rose du Carmel, de Théophile Bernugat. L’essentiel de la flottille se tenant entre 1 et 5 tonneaux.

 

L’entrée des Allemands au Conquet le 19 juin 1940 arrête toute activité maritime locale pour quelques temps.

 

L’opération « Otarie » : En continuité de l’invasion de la France, Hitler voulait vaincre les Anglais sur leur territoire, en faisant traverser la Manche à ses troupes. François Le Bris, m’a dit un jour : « lorsque les Allemands sont arrivés au Conquet, ils ne pensaient pas que l’Angleterre allait tenir longtemps et quand on les promenait dans le port, (ils avaient de l’argent pour payer), certains montraient Béniguet en demandant : « c’est l’Angleterre ? ».

 

Les Allemands ont alors lancé une vaste réquisition d’embarcations de toutes sortes. La revue « Historia » précise 1 722 chalands, 1 161 navires à moteurs, 475 remorqueurs, 155 grands transports. Entre juillet et octobre 1940, la rade du Conquet a été encombrée de flottilles hétéroclites. Les soldats allemands la plupart du temps incompétents, essayaient de piloter ces navires, s’abordant les uns les autres et provoquant de multiples avaries. Un coup de vent de suroit n’a pas arrangé les choses. D’autre part des pinasses de Guilvinec avaient été équipées de petits canons, mais trop forts pour ces bateaux légers. A chaque tir d’entraînement les lisses ou les pavois cassaient.

 

Témoignage de Louis Marec (15 ans) « Il y avait là des bateaux douarnenistes, des Camarétois, des Molénais, dont celui de Cariou qui a été perdu sur Béniguet. Son moteur a été récupéré et ramené au Conquet. Témoignage de Jean Marie Le Bris : « je me souviens d’un chalutier de Boulogne-sur-Mer arrivé avec patron et équipage et qui a été désarmé au Croaé. Un jour le moteur a été vendu, c’était un DB2 récent fonctionnant au gasoil. Un mécanicien de Lampaul nommé Malherbe. l’a remis en état pour une gabare de Lampaul. Le bateau a ensuite été abandonné dans les « Glazennou », à l’est de Coz-Castel, on en voit encore un bout de la mèche du gouvernail (2009).

 

Quelques bateaux du Conquet, motorisés, ont aussi été réquisitionnés ainsi on lit sur son rôle : Jeanne D’arc, B5284, sloup construit à Camaret en 1930, 9,57 tonneaux, moteur Couach 12/14, à Louis Le Goaster. Réquisitionné par les Allemands le 8 août 1940, perdu par eux et abandonné à la côte près de Camaret. Extinction du rôle le 5 novembre 1940.

 

 

Une note sans détail dans un cahier de la Mairie : 22 août 1940, réquisition du Rouanez-Breiz-Izel patron Quéméneur pour aller envoyer à Landévennec les patrons du Dom Michel et du Janua Caeli. Il s’agissait sans doute d’aller récupérer ces bateaux rendus à leurs propriétaires.

 

Toujours dans le cadre de l’opération « Otarie », les Allemands se sont entraînés à des exercices de débarquement à Béniguet, mais aussi dans le port du Conquet. Mon père dit encore François Le Bris, a été parfois requis pour transporter des soldats de la grande cale du Drellac’h à la cale des « pigouilles » pour des exercices de débarquement. Une fois les Allemands ont voulu prendre l’Asta-Buen pour aller à Ouessant, mais ils n’ont pas pu mettre le moteur en route, puisque la magnéto était tous les jours démontée et mise à la maison sur un morceau de liège à côté du fourneau, pour qu’elle ne soit pas dégradée par l’humidité à bord. Les soldats sont partis en dérive dans le port avec le bateau qui avait son vivier plein, (plus personne n’achetait la pêche). Finalement mon père a pu récupérer son bateau sans avaries.

 

 Jean Simier, cultivateur à Béniguet, décrit dans ses souvenirs un exercice de débarquement sur l’île. Après un pilonnage au canon, 3 000 hommes de troupe ont donné un assaut contre un ennemi fictif. Les bâtiments de la ferme n’ont pas été touchés mais les abris de goémoniers ont été renversés par les obus, tandis que les champs de seigle et de pommes de terre étaient piétinés par les soldats.

 

Dès que les Allemands renoncent à l'invasion de l'Angleterre, la pêche côtière redevient possible avec certains handicaps et certaines contraintes :      

 

Le peu d'essence attribuée mensuellement ne permet pas faire beaucoup de route, et comme pour réparer les voiles usées ou déchirées, la toile devient rapidement introuvable, le pêcheur ne peut pas s'éloigner beaucoup du port... Jean Marie Le Bris : « tous les moteurs des Molénais étaient stockés dans l’ancien abri du canot de sauvetage (actuelle maison de la Coopérative. C’étaient des 10/12 Baudouin, ils avaient des étiquettes avec le nom de leur propriétaire. Les Conquétois avaient pu garder leurs moteurs mais ne pouvaient obtenir que quelques litres d’essence par mois. On utilisait le moteur seulement pour passer les courants trop forts, puis les voiles ont commencé à pourrir par le bas, alors on a pris un ris, puis deux. On n’avait pas de chaînes non plus pour amarrer les bateaux, par contre de goudron pour coaltarer les coques on n’a pas manqué. Les Allemands camouflaient les blockhaus avec, ils peignaient même les cailloux autour. »

 

 

Tous les patrons ont alors un cahier qu'il faut faire viser par les douaniers allemands à la cale du canot de sauvetage. Le factionnaire vérifie que l’équipage est le même à l’aller qu’au retour, et qu’il n’y a pas de pigeons voyageurs cachés à bord.

 

La surveillance en mer est faite par une vedette des douanes allemande, ancienne pinasse d'Arcachon. Elle ne rentre au port qu'après les derniers bateaux et parfois elle remorque les retardataires. Le même équipage est resté toute la durée de la guerre en poste au Conquet.

 

Chaque bateau doit arborer un petit guidon jaune cousu à la voile et bien visible : Yves et François Le Bris témoignent « un jour, ils sont avec leur père à bord du bateau familial l'Asta Buen. En passant St Mathieu un allemand sur la côte les interpelle et leur fait signe d'accoster... Mettre bout à terre à Saint-Mathieu impossible... l'Asta Buen se rapproche cependant, l'Allemand fait comprendre à l'équipage que le guidon jaune n'est pas visible et qu'il faut le mettre clair. Le retour au Conquet est sinistre, le père Le Bris est persuadé qu'il va être arrêté dès l'accostage, sanctionné et peut-être même emprisonné. En fait aucun comité d'accueil n'attend l'Asta-Buen, l'incident n'a pas de suite... »

 

La flottille conquétoise pêche principalement au casier,  l'osier est comme avant-guerre, coupé sur les talus des Blancs-Sablons et dans la campagne autour du Conquet. Les casiers sont confectionnés par les pêcheurs. Les espèces capturées sont : rougets, vieilles, tacauds, raies, chiens, roussettes, congres.... et crustacés : homards, langoustes, araignées, tourteaux. La pêche à la ligne apporte bars, lieus, maquereaux...

 

LISTE DES BATEAUX ARMES A LA PÊCHE  AU CONQUET EN JANVIER 1941

 

Anne Louise              Le Goaster                             

Bidouric                    Pennec

Janua Caeli               Guillimin

Fleur des Iles            Le Roux

Tzigane                     Le Bris Gabriel

Fleur des Algues       Bernugat J.

Reder Mor               Appriou

Reine des Flots         Balcon

Cormoran                 Peres

Cigale                       Cuillandre

Jeanne Madeleine      Falhun

Rose du Carmel        Bernugat

Mon Rêve                Gendrot

Le Juif Errant            Botquelen

Marsouin                  Cuillandre

Alfred                       Le Gall

Normandie                Riou

Asta Buan                 Le Bris

Marguerite                Guena

Zita                            Podeur

Yvonne et Jean          Le Goaster

Madeleine                  Menguy

6 Amis                       Copy                                           

Rouanez Breiz Izel     Quéméneur  
                                                                                          Reine des Flots à Balcon François Marie



Rouanez-Breiz-izel
Construit en 1930 à Carantec pour Quéméneur Yves (né à Plouarzel), vendu en 1949 à un autre Yves Quéméneur (son fils?) pour 30 000 Francs.
Photo carte postale Yvon vers 1950.
    
       






Petite Soeur Thérèse  Menguy                             

Nd de la Vallée          Lhostis

Jean Claude               Tanguy

Reine des Anges         Lucas

Ste Marie                   Minguy

Dom Michel               Le Bris

Berceau du Marin       Lucas

Ste Anne                    Abily

 

 

 

6 Amis, bateau à Ambroise Copy. 4,90tx, moteur 5/7 Couach, construit à Camaret et baptisé au Conquet le 21 juillet 1921 à l'issue de la grand-messe.  Désarmé et démoli en mars 1946.










15 janvier 1941, une sanction heureusement vite levée :

 

 Interdiction de la pêche en mer dans le Finistère

 

La raison donnée par les autorités allemandes ? est que des pêcheurs ont fait passer avec leurs bateaux des gens en Angleterre.     Mais     comme   on   peut   le  lire dans   l'article  du   journal "La Dépêche" une dizaine de jours plus tard, la mesure est rapportée et la pêche côtière est à nouveau autorisée dans les conditions fixées fin août 1940.

 

 





Ecoulement de la pêche :

 

Le produit de la pêche sert en partie à la consommation locale et brestoise, les mareyeurs du Conquet achètent surtout les poissons. Les espèces nobles : homards et langoustes sont stockées en viviers, des mareyeurs de Labervrac'h, Roscoff ou Loguivy (Trois établissements tenus par Ouhlen), viennent régulièrement enlever la marchandise pour le marché parisien.

 

Fin 1942, l'augmentation de la flottille :

 

Le sabordage de la flotte à Toulon rend à la vie civile un certain nombre de Conquétois, marins de l’Etat, qui ne cherchent pas à rejoindre la France Libre, mais rentrent au Conquet où ils n’ont d’autre recours pour gagner leur vie, que d’acquérir un bateau et l'armer à la pêche. Inutile de penser à trouver une place de matelot, les patrons n'ont pas les moyens financiers pour augmenter leurs équipages. Les bateaux d'occasion se trouvent semble-t-il facilement, puisqu'au premier janvier 1943, la flottille de pêche du Conquet compte 45 unités. (Chiffre jamais atteint depuis)

 



Dom Michel, Br4875, construit au Conquet en 1927. 7,46tx, pour François Le Bris, vendu en 1945 à Emile Le Bris, puis à Léon Lucas, et en 1952 à un Kervella de Plougastel.
Moteur à l'origine 5 cv, puis 10 cv ensuite.



















Réquisitions de main d’œuvre :

Comme tous les hommes valides de la commune, les pêcheurs étaient soumis au régime du volontariat pour les travaux du mur de l’Atlantique ou des  réquisitions.

Exemples :

La Kommandantur demande des hommes pour les travaux de terrassement. 6 heures par jour, salaire 7,60 francs de l’heure, une soupe à midi. Se présenter le 1er décembre 1943 à 8 heures à la StandortKommandantur (Beauséjour).

 

24 mai 1944, demain matin à 8 heures, rassemblement de tous les hommes requis pour le travail, pêcheurs compris, à Beauséjour.

 

2 juin 1944, les pêcheurs sont avisés qu’ils devront par ordre des autorités allemandes se rendre au travail les jours suivants : lundi, mercredi, vendredi de chaque semaine. Ces jours-là, aucun bateau ne devra aller en mer. Les troupes de la côte ont reçu l’ordre de mitrailler les bateaux qui tenteraient de sortir.

Etc…

 

JUIN-JUILLET 1944

Le 5 juin 1944 est le dernier jour où les pêcheurs sont allés en mer. 27 bateaux ont livré homards (environ 170 kilos) et araignées (1370 kilos), La Cigale a Cuillandre 12 kilos de lieus, la Mouette à J.F Lucas, 4 kilos de lieus, la Madeleine à F Menguy 3 kilos de lieus et le Juif Errant à Botquelen 11 kilos de bars.

A propos du Juif Errant, c'était un petit bateau construit à Plouguerneau en 1932, équipé d'un moteur Aster 6/7 cv, puis d'un Bolinders de même puissance, qu'il fallait faire chauffer à la lampe à souder avant de le démarrer. Le patron en était Yves Botquelen de Tréglonou, il faisait la pêche à la senne aux mulets près de Béniguet, dont à l'occasion il assurait le ravitaillement, On m'a rapporté que "Jakig Tréglonou", le "fameux" recteur de la paroisse du même nom l'appelait "Bag an Diaoul", le bateau du diable parce qu'il n'avait pas été baptisé. On peut aussi s'étonner que sous l'occupation nazie, l'embarcation ait gardé son nom de "Juif Errant". En 1946 le bateau a été vendu à François Corre de l'Hôpital-Camfrout.


A partir du 6 juin (débarquement en Normandie), toutes les sorties ont été interdites.

Le 13 juin, 10 patrons qui avaient leurs matériels en mer ont été autorisés à aller les ramasser.

Le 22 juin, ordre de la Kommandantur d'amarrer les bateaux à la digue (Saint-Christophe). Un certain monsieur Rolland obtient qu'ils restent sur leurs corps-morts.

Le 29 juillet, Henri Abily (Sainte-Anne) est requis pour aller en mer, pêcher pour le ravitaillement des autorités d'occupation.

 

AOUT 1944:

 

La destruction de quelques bateaux de pêche et des quais et cales... 

 

Depuis quelques temps déjà, les Allemands imposaient chaque soir la réquisition d'une charrette et d'un cheval qui devait stationner dans la cour de la Gast (maison De Blois) au-dessus du port. Cette charrette devait recevoir en cas de besoin, un chargement  de tubes métalliques remplis d'explosifs, pour dynamiter des cibles déterminées à l'avance. 

 

Le 7 août au matin, Les Allemands préviennent la municipalité :  Kommandantur.. le commandant du Conquet avertit la population de conserver son calme et l'ordre. Au cas contraire, toutes les armes disponibles seront prises pour le tir de la ville du Conquet, sans tenir compte des pertes. Et au crayon noir en marge.. Par ordre de la Gast, prière d'évacuer immédiatement Le Conquet à 1 km  pour l'explosion des mines qui se trouvent sur le quai.

 

 Les soldats procèdent alors à la mise à feu des mines placées dans les digues, cales, quais, puis à marée basse ils vont placer un tube d'explosif dans chaque bateau de pêche ou goémonier.....  Plusieurs navires sont  gravement avariés : des goémoniers,  mais aussi la Sainte-Marie à Henri Minguy, étrave arrachée, l'Anne-Louise à Louis Goaster. l'Auguste à Louis Lucas, incendié. D’autres ont été épargnés, parce que l'explosion de tubes non fixés, n'a causé que des dégâts minimes, ou parce que les mèches se sont éteintes (bateau de Falhun), ou encore parce que la marée montant, les Allemands n'ont pas voulu remplir leurs bottes pour atteindre certains bateaux comme le Petit-Jean de Gabriel Le Bris.

 


La Sainte-Marie, , construite à Roscoff en 1928, pour Paul Le Boïté, acquise en 1936 par Henri Minguy.
Bateau désarmé et démoli en 1959.
Photo collection Burdin










Certains patrons comme Yves Le Bris, craignant une récidive des Allemands contre les navires intacts préfèrent remonter  leurs bateaux au Croaé où ils les sabordent volontairement  en déclouant une planche de bordé de fond.

 

Bilan des dégâts portuaires: digue Sainte-Barbe, deux brèches; maison-abri du canot de sauvetage entièrement soufflée, en s'effondrant elle a écrasé le canot Nalie Leon Drouin qui s'y trouvait toujours; môle Saint-Christophe, une grande brèche près de l'enracinement; cales du Drellac'h réduites à l'état de tas de cailloux. 

Le quai du Drellac'h, cales détruites.



















L'abri du canot de sauvetage écroulé sur le "Nalie-Léon-Drouin".

















Le 30 août, la Cigale, le Jean-Emile et l'Hélène sont canonnés (sur leurs mouillages)

Le 10 septembre 1944, les derniers Allemands du secteur se rendent, Le Conquet est libéré. Les pêcheurs  vont retourner en mer.

Le mercredi 13 septembre, Le Boîté est le premier à sortir en pêche, ce jour-là la Yolande ramène 12 kilos de mulets, 10 kilos de rougets, 6 kilos de vieilles, 4 kilos de lieus et 8 kilos de raies, (pêche aux filets). Le lendemain Léon Lucas (Margueritte) et Jean Goaster (Mon Rêve) reprennent leurs activités.

D'autres suivront, mais seulement une dizaine de patrons va continuer la pêche l'hiver 1944-45. Il est probable que les marins de l'Etat qui s'étaient mis à la pêche pour le temps de la guerre, ont rejoint leurs quartiers.

A noter que le 15 septembre, les Molénais dont les moteurs et les voiles étaient consignés au Conquet sont venus les récupérer.






Fleur des Iles, dernier "Kerhorre" à fréquenter Le Conquet. Patron Pierre Leroux.












A SUIVRE JPC/ Octobre  2009, (d'après une enquête effectuée en 1985-89).








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15 septembre 2009 2 15 /09 /septembre /2009 16:52

Les morts mystérieuses de l’hôtel de Bretagne

 

L’hôtel de Bretagne est tenu en 1865 par Auguste Joubert et sa femme Virginie Catherine Pétrement. L’établissement assure aussi le service des dépêches et offre deux places de voyageurs entre Le Conquet et Brest dans une voiture à deux roues. En 1872, madame Joubert est veuve quand elle fait construire une aile nord à l’hôtel.

 



L'hôtel de Bretagne dans la Grand-Rue















Au recensement de 1881, Louis Désiré Besson, est gardien de batteries, il habite avec  son épouse Eugénie Menguy et ses enfants, Grand-Rue au Conquet. (On sait seulement de lui qu’il a été condamné par un tribunal des Armées en 1862 pour vol d’effets militaires). Entre 1881 et 1885, le couple achète l’hôtel  de Bretagne pour l’exploiter. Virginie Aimable Joubert et sa mère « veuve Joubert » sont parties au bout de la rue,  tenir l’hôtel du Lion d’Or.

 


Ci-dessous, l'hôtel du Lion d'Or à une époque plus récente quand il était tenu par Mr Forest
.



















En 1885, Besson a 47 ans, il est hôtelier, sa maisonnée se compose de lui-même, de sa femme, 38 ans, de ses deux fils Paul et Jules et d’une domestique Eugénie Marie Roussel âgée de 17 ans.

 

Un client de l’hôtel disparaît, on retrouve son corps presque deux ans plus tard.

 

Dans la première quinzaine de juillet 1885, un maquignon normand, marchand de chevaux, séjourne au Conquet pour affaires, il a pris pension à l’hôtel de Bretagne quand, sans raison, le 12 du mois,  il disparaît.  « On » sait  qu’il avait alors une grosse somme d’argent sur lui, deux mille francs, soit pour acheter des bêtes, soit le produit de la vente d’animaux ?

L’histoire ne le précise pas.

 

En l’absence de tout témoignage, de tout indice, l’enquête des gendarmes est vite close, deux années ou presque passent.

 

Le 3 mai 1887, vers 5 heures du soir,  Jérôme Leizour cultivateur à Kerzoniou (commune de Plougonvelin, secteur de Toul an Ibil) fait, non loin de sa ferme, dans une petite garenne sur le bord du chemin qui conduit à la route N°12 (Brest-Le Conquet), une macabre découverte : des restes humains.

 

Il s’empresse de prévenir le garde-champêtre Jean François Grall. Alerté le procureur de la République arrive à Plougonvelin le soir même ou le lendemain et ouvre une enquête. Au vu de la blouse bleue remarquable des marchands de bestiaux, qui enveloppe encore les ossements, les gendarmes pensent immédiatement être en présence des restes de Le Hoult – Courval, disparu du Conquet en 1885.

 

Ils en ont rapidement la certitude puisque le registre des décès de Plougonvelin porte sans équivoque,  à la date du 5 mai 1887, l’inscription du décès du maquignon :   « un squelette humain reconnu comme étant celui de Le Hoult Eugène Emeric dit « Courval », disparu du Conquet le 12 juillet 1885… né à Sap canton de Vimoutiers dans l’Orne, âgé de 53 ans, fils de défunt Théodore et de Le Charpentier Nathalie Eugénie, époux de Bouteiller Désirée Florence… signé Keriguy, maire »

 

L’examen de la dépouille par un médecin légiste n’apporte rien. Le Hoult est inhumé dans le cimetière de Plougonvelin et les gendarmes se bornent à constater que la sacoche contenant les deux mille francs et qui aurait dû accompagner le corps, a disparu. Louis Besson ne semble pas avoir été soupçonné.

 

 

Les années passent, Louis Besson fait en 1896 de grands travaux à l’hôtel de Bretagne qu’il agrandit. (déclaration de construction d’une maison Grand-Rue, en remplacement d’une autre maison section A282, entrepreneur Migot) Et comme l’argent ne lui manque semble-t-il pas, il achète en 1898 au propriétaire Guillaume Quiniou, l’hôtel Sainte-Barbe et des terrains y attenant.

 

 

L'hôtel Sainte-Barbe
vers 1900













La mort de madame Besson, suicide ou crime ?

 

On peut lire dans le journal  « Le Finistère » du 12 juillet 1899 : Le Conquet.- Est-ce un crime ?

 

 « Le parquet de Brest a fait la semaine dernière une descente au Conquet sur la réquisition du maire. La dame Besson, femme du propriétaire de l’hôtel de Bretagne est décédée le 5 juillet, dans des conditions qui ont paru singulières. Son mari a averti le maire qu’il l’a découverte pendue. Le médecin a déclaré l’avoir trouvée couchée sur le lit, la tête dans les oreillers. Une corde coupée pendait à côté du lit, attachée à un portemanteau. Des ecchymoses nombreuses ayant été constatées sur le cadavre, le parquet a fait mettre au secret le mari de la défunte.

 « L’affaire se complique encore, écrit le journaliste,  car on se rappelle qu’en 1885, un riche maquignon normand disparut au cours d’une nuit passée à l’hôtel de Bretagne. On retrouva son cadavre 27 mois plus tard dans un bois voisin. Une somme de 2 000 francs lui avait été soustraite. On prétend que Besson ne serait pas étranger à l’affaire. On explique même le meurtre de sa femme, très expansive et menaçante quand elle avait bu, par le désir de la faire taire à jamais sur cet ancien crime. »

 

Louis Besson est arrêté, puis son procès commence

 

Emprisonné donc début juillet 1899, Besson est devant la cour d’assises du Finistère à Quimper le 5 janvier 1900.

 

Rappel des faits et audition des témoins

 

Compte-rendu extrait du journal « Le Finistère »  du 8 janvier et jours suivants.

-7e affaire –

Les époux Besson tenaient un hôtel au Conquet. Depuis plusieurs années ils vivaient en mésintelligence. La femme avait pris l’habitude d’intempérance et s’enivrait presque journellement. Pour cette raison, son mari semble parfois s’être livré sur elle à des voies de faits. A diverses reprises Besson lui avait dit : « crève donc, crève donc ! », à quoi elle répondait « tuez-moi, tuez-moi ! ». Aussi le domestique Jézéquel avait-il dit à la cuisinière : « Tout ceci finira par un malheur et vous verrez que nous serons appelés comme témoins. »

Le mercredi 5 juillet, vers 1 heure 30 de l’après-midi, la femme Besson se trouvait encore sous l’influence de la boisson. Une querelle s’éleva entre elle et son mari. Celui-ci lui dit : « tu ne mérites pas d’abri, vermine. La mer serait ta place ! » Il ajouta qu’il regrettait de ne pas avoir son revolver.


Jules Besson, le fils, monta sa mère dans sa chambre au premier étage où, il l’enferma comme on en avait l’habitude quand elle était ivre. Le domestique Jézéquel et la femme Pastol, la cuisinière, intervinrent, prirent Besson père par le bras et l’empêchèrent de suivre sa femme. Il voulut à ce moment descendre à la cave où l’on a découvert depuis le rouleau de corde dont une partie semble avoir été coupée, pour suspendre le corps de la victime. Jézéquel et la cuisinière l’ayant retenu, il s’écria « quatre autres à ma place seraient au bagne maintenant ! ». (Phrase pour le moins sibylline). Louis Besson fit alors monter par son fils du cognac à sa femme en lui disant « porte lui cette bouteille, qu’elle crève au moins ! ». Mais il ne paraît pas que la femme Besson ait bu de son contenu puisque l’autopsie de son corps pratiqué quatre heures plus tard a démontré qu’il n’existait dans son estomac aucune trace d’alcool.

Environ une demi-heure plus tard, Besson prit la clé de la chambre de sa femme que son fils avait remise en place, et s’y rendit. Un instant après qu’il y eut pénétré, on entendit au rez-de-chaussée un bruit lourd comme la chute d’un corps. L’accusé ne  nie pas avoir jeté sa femme à terre mais, c’était à ce qu’il prétend, en ouvrant brusquement la porte derrière laquelle elle se trouvait. Il redescendit bientôt après avoir fermé la porte à clé.

Les domestiques le virent un peu plus tard aller à la cave puis remonter une seconde fois à l’étage où il resta environ 8 minutes. Redescendu de nouveau, il resta seul pendant quelques temps dans une salle du rez-de-chaussée de l’hôtel et, entre 2 heures et demi et 3 heures moins le quart, il monta une troisième fois, pénétra dans la chambre de sa femme et presque aussitôt se mit à crie en appelant son garçon (d’hôtel) : « Jean Marie, Jean Marie, venez vite, venez vite ! »

Jézéquel se doutant bien qu’un malheur était arrivé ne voulut pas monter sans la cuisinière. Dans un cabinet noir attenant à la chambre et dans lequel Besson avait l’habitude de coucher, ils aperçurent, à la tête du lit, le cadavre de la femme, le dos tourné vers la porte, reposant sur la jambe gauche qui était repliée sous le corps, tandis que la jambe droite était allongée en avant. Les deux bras pendants étaient appuyés sur le matelas. La tête un peu renversée en arrière était retenue par une corde dont une extrémité passait par dessous le menton sans faire le tour du cou et dont l’autre extrémité s’enroulait aux patères d’un portemanteau fixé dans la cloison au-dessus du lit. Besson coupa alors la corde, le corps retomba sur le lit et l’accusé prit alors l’attitude d’un homme vraiment peiné.

 

Le docteur Pethiot, officier de l’Etat-civil appelé pour constater le décès eut, après l’examen du cadavre, la certitude que la femme Besson venait d’être tuée par une main étrangère et, cette conviction, il l’a nettement exprimée à plusieurs reprises au cours de l’information.

La justice immédiatement avertie se transporta au Conquet et il fut procédé à l’autopsie. Elle permit au médecin légiste d’affirmer que la mort était due à l’asphyxie pulmonaire et que cette asphyxie n’avait pas pour cause unique et principale la strangulation au moyen de cette corde, qui n’avait laissé sur le cou, d’un seul côté, qu’un sillon peu profond et de 11 centimètres de longueur. L’instruction n’a fait que confirmer cette opinion.

 

Appelé à se prononcer à nouveau après avoir pris connaissance du dossier, le médecin expert a énergiquement soutenu qu’il était impossible que la strangulation au moyen de la corde eut, à elle seule, amené la mort et que, des circonstances et constatations matérielles, on devait forcément conclure que la corde avait été placée autour du cou par une main étrangère et criminelle.

 

Bien que la femme Besson ait à trois reprises différentes, antérieurement, tenté de se suicider,  mais alors elle était sous l’emprise de la boisson (et il est certain qu’au moment de sa mort, elle n’était pas ivre), on ne saurait admettre la version de Besson  qui nie énergiquement le crime dont il est accusé et qui prétend que la mort de sa femme est liée à une pendaison volontaire. Elle a été tuée, et lui seul qui l’a approchée dans les conditions qui viennent d’être rappelées depuis le moment où elle est montée dans sa chambre, peut être l’auteur de sa mort.

 

A ce moment du procès d’assises, le journaliste n’a pas le moindre doute, l’instruction et les rapports médicaux sont concordants, Besson est coupable. Il ne reste à la dernière audience qu’à prononcer la sentence.

 

Mais toutes les certitudes de notre journaliste sont balayées en un rien de temps. Dépité, il bâcle son compte-rendu du verdict en quelques lignes.

« Avant l’ouverture de la séance, une scène émouvante se passe entre Besson et ses deux fils. Ils se dirigent brusquement vers  leur père qui les étreint avec effusion en disant « mes pauvres enfants, mes pauvres enfants ! » Ils pleuraient,  tous les trois gémissaient, les enfants disaient « mon pauvre père ! ». L’aîné des fils s’est trouvé mal pendant ces moments. »

 

Louis Besson est acquitté

 

Monsieur Bouessel, procureur de la République représentant le ministère public,  commence l’interrogatoire, Besson nie toutes les accusations contre lui et soutient que sa femme s’est suicidée. On entend ensuite les témoins à charge et à décharge. Trois médecins déposent, deux dans le sens du meurtre, le troisième, le docteur Bremaud penche pour le suicide. Après une plaidoirie de maître Maurer, avocat de Besson, le jury se retire pour délibérer. Il rentre quelques minutes plus tard : Besson est acquitté ! En descendant du banc des accusés, Besson en larmes s’écrie : « Je suis innocent ! » et il étreint ses enfants qui le serrent. La scène est vraiment touchante. Le vieillard (il a 62 ans) quitte le tribunal en s’appuyant sur ses enfants. L’émotion lui paralysant toutes ses forces.

 

  

Louis Besson laisse, semble-t-il, la direction de ses deux hôtels à son fils Paul, dès son retour au Conquet. Paul Besson est alors âgé de 24 ans. Quelques semaines après le procès de son père, le 18 février 1900,  il épouse Marie, fille du boulanger Prosper Roué, la mariée n’a que 16 ans. L’extension de la propriété à Sainte-Barbe continue, le 28 juin 1900, la mairie cède à Paul François Besson un vague communal de 450 m² à la pointe,  entre les chemins vicinaux 1 et 2.


Le malheur continue à s’abattre sur la famille car Paul décède le 18 octobre 1903.

Voilà Marie Roué veuve à 19 ans et maîtresse de deux hôtels au Conquet. Une courte existence pour la jeune femme car elle meurt âgée seulement de 26 ans en 1910 ( V. note). L’hôtel de Bretagne est alors repris par  François Le Bars propriétaire de l’hôtel du Commerce.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 






--


 Quant au second fils du couple Louis Besson / Eugenie Menguy, Jules Louis Besson, né au Conquet en 1881, cuisinier à l'hôtel de Bretagne, ne voulant sans doute pas travailler avec son frère et sa belle-soeur, il préfère s'engager volontaire dans la Marine en 1902. Il a alors 21 ans.
Apprenti-marin à Toulon, il est condamné à deux ans de prison par le Conseil de Guerre le 8 avril 1905 pour faux en écriture et vol d'argent au détriment d'un autre marin. Les faits se sont déroulés à bord de la "Marseillaise". Gracié du restant de sa peine en juillet 1906, Jules Besson est incorporé dans le 2e bataillon d'Infanterie légère d'Afrique à Laghouat en Algérie. De retour au Conquet, le jeune homme y décède le 3 septembre 1908. 
                                                                         JPC 09/2009
Note, ajoutée le 22 avril 2011.

Dans les annonces du journal "Ouest-Eclair" daté du 3 février 1910.

Etude de M. Vichot, avoué licencié à Brest, 24 rue de Siam et de Mtre Andrieux notaire au Conquet.

Vente par licitation judiciaire

En l'étude et par le ministère de Mtre Andrieux, notaire au Conquet, le lundi 21 février 1910 à 2 heures de l'après-midi.

Désignation

1er lot, en la ville du Conque, l'Hôtel de Bretagne , comprenant vaste maison à usage d'hôtel, avec caves, deux grandes salles à manger, café, débit, petite salle, cuisine, billard, 25 chambres, water-closets, grande cour, deux écuries, deux remises, salle de plonge, puits, citerne, lavoir.

Contenance 1000 mètres carrés.

Loué jusqu'au 29 septembre 1918, moyennant 1 500 francs l'an, moitié des impôts en sus.

Vue magnifique sur la mer, situation exceptionnelle pour tout commerce.

Mise à prix 25 000 francs.

2e lot, maison contiguë à l'hôtel, bien située pour un petit commerce, revenu annuel 180 francsMise à prix 2 000 francs.

3e lot, Terrain à bâtir au Conquet, près de l'hôtel Sainte-Barbe, situation pittoresque, 125 m². mise à prix ? francs.

                                                 Voir les affiches. E. Vichot.

 

Dans le même quotidien le 20 février 1910 : vente reportée en raison du décès de madame veuve Besson.

 

L'annonce sera remise en page dans le quotidien du 24 avril 1910.   JPC

 

 

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14 septembre 2009 1 14 /09 /septembre /2009 09:37

« TOUL AL LOGOT »

Trou des souris





JOURNEES DU PATRIMOINE

19 ET 20 SEPTEMBRE 2009

 

Dans le cadre des journées du patrimoine, des bénévoles de l’association PHASE (Plougonvelin, Histoire et Avenir, Souvenir et Ecoute) ont été à la disposition des visiteurs sur le site de l’ancienne batterie de Toul al Logot, pour leur donner toutes les explications nécessaires à la compréhension de cet élément de défense côtière.

Le site de Toul al Logot, traversé par le GR34 est accessible toute l'année. Les promeneurs qui circulent sur le sentier côtier, trouveront des panneaux explicatifs de l'historique de la batterie et des travaux en cours. Pour des raisons evidentes de sécurité, il est impératif de ne pas franchir les barrières délimitant le chantier de fouilles.  
 

 

 



 
Pour se rendre à Toul al Logot, à partir de la route de Brest, rejoindre le parking de la stèle FFI au Cosquer, puis continuer à pied par le GR34 en direction de Porsmilin.
































Rappels historiques :

 

Située sur une pointe rocheuse entre les plages de Porsmilin et de Pors Ki, cette batterie armée de quatre canons,  si elle n’a pas été, semble-t-il, édifiée par Vauban a très certainement fait l’objet d’un réaménagement et d’un complément d’équipement dans les années 1680-1690, à l’instigation du maréchal, chargé par Louis XIV d’assurer la défense du port de Brest, contre de sérieuses menaces anglaises.

 

En appui du fort de Bertheaume, la batterie de Toul al Logot empêchait tout mouillage de flotte ennemie dans la baie et tout débarquement de troupes sur la plage du Trez-Hir qui était en outre battue par la batterie des Longs-Sablons et par deux batteries de flanquement Nord (le belvédère) et sud (Saint-Yves).

 



Extrait d'un plan du XIXe, en "a" le corps de garde, en "b" une guérite ronde, en "c" le four à rougir les boulets, en "d" la poudrière, en "e" une guérite de veille, en "g" la carrière, en "f" la plateforme de tir avec les emplacements de quatre canons."







Comme la plupart des batteries côtières rendues obsolètes par les progrès de l’artillerie, Toul al Logot a été remise aux domaines en 1857. Le corps de garde fut « maison d’habitation » jusqu’à la fin du XIXe siècle.


(Texte extrait d'un document de présentation écrit par les responsables de Phase)

 

Intervention de PHASE :

 

Dans le cadre de la commémoration en 2007, du tricentenaire de la mort de Vauban, les responsables de PHASE ont entrepris des recherches d’archives concernant Toul al Logot et ont commencé les premiers défrichages pour dégager l’esplanade de la batterie enfouie dans une végétation très dense, de prunelliers, ronces, fougères…

 

Première campagne :

 

Au mois de juin 2008, après avoir obtenu toutes les autorisations nécessaires, une équipe d’une douzaine de bénévoles a réalisé la première tranche de travaux de mise en valeur du site. Dégagement du parapet de tir, de la plateforme, du magasin à poudre, de la guérite de veille.  En dépit d’une recherche minutieuse, il n’a pas été possible de retrouver le moindre élément du four à rougir les boulets, pourtant localisé sur le plan. La campagne de fouille terminée et une fois la voûte de la poudrière bien étayée par les services municipaux de Plougonvelin, le chantier a été mis en sommeil en juillet 2008. Les « trouvailles », tessons de poteries, boutons d’uniformes, petit boulet etc… feront l’objet d’une prochaine exposition.

 

 

La plateforme et le parapet qui abritait quatre canons.











Fin des travaux été 2008

TOUL-LOGOT26-JUIN-08-001---Copie.jpg

La poudrière a été entièrement dégagée et fouillée.















Deuxième campagne



Etat février 2009 

Le pignon du corps de garde pris dans le lierre, l'épine noire et les ronces 




















Côté nord du GR34. Après un difficile défrichage en mars-avril dû à la densité des buissons d’épine noire, (spern du), entremêlés de ronces,  les mêmes bénévoles de PHASE, ont passé le mois de juin 2009 à exhumer les ruines de l’ancien corps de garde, pour en dégager le plan au sol.


Courant mars 2009
, le président de Phase et quelques bénévoles à l'ouvrage.












 



Comme l’année précédente, le chantier a été arrêté début juillet.



Eté 2009, fin des travaux de l'année :

Corps de garde, vue intérieure avec le foyer de la cheminée.

Le bâtiment sur deux étages, pouvait accueillir 15/20 canonniers.









005---Copie.jpg

Septembre 2009

 Ci-dessus : vue partielle du site, le pignon du corps de garde, la poudrière. Au fond le rocher de Bertheaume
.

Les pyramides au premier plan, qui étonnent les promeneurs, sont faites des cailloux, issus des déblaiements et bien rangés pour une éventuelle et future utilisation. 


 


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La poudrière septembre 2009.

















Troisième campagne

 

Pas encore planifiée, elle concernera sans doute en 2010, l’inventaire d’une petite carrière proche, d’où a été extraite une partie des pierres de construction des bâtiments de la batterie. En attendant il faut entretenir le site contre la reprise de la végétation.







 

Pour tout renseignement concernant PHASE, pour connaître ses travaux en cours, en archives ou de terrain,  pour adhérer à l’association, consulter son site   www.phase-iroise.fr

 

                                       JPC, bénévole de l’association PHASE 

Un autre but de promenade dans le même esprit, la batterie de Lanildut, en bordure du GR34 qui mène vers Melon, réhabilitée en 2000-2004 par l'association Aber-Ildut Loisirs et Culture, elle a reçu en 2007 une réplique de canon côtier. Des canons de Marine du même genre, équipaient la batterie de Toul al Logot.

Le canon de la batterie de Lanildut.

                            
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